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LA VERSION PRONONCÉE FAIT FOI

Distingués Parlementaires, Mesdames et Messieurs,

C’est un privilège d’être ici, à Bruxelles, avec vous tous.

Avant de commencer, j’aimerais d’abord exprimer mes condoléances à la suite du décès en début d’année du président Sassoli.

C’est une grande perte pour votre Parlement et pour l’Europe.

J’aimerais également prendre un moment pour adresser mes condoléances aux proches des victimes de la tragédie de Louvière ainsi qu’à tous ceux dont la vie a été bouleversée par ces évènements.

Nos pensées et notre amitié sont avec la Belgique en ces moments difficiles.

Je me suis adressé au Parlement européen à Strasbourg pour la première fois en 2017.

C’était la première fois qu’un premier ministre canadien s’adressait à ce Parlement.

À l’époque, ce parlement me considérait comme étant un nouveau joueur sur la scène internationale.

Nous nous sommes mis au travail, nous nous sommes attaqués à des enjeux progressistes, nous avons mis en œuvre ce qui était cher à nos yeux.

Nous pouvions voir que quelque chose se tramait à l’horizon, nous discernions une ombre, une menace. 

Nous n’avons pas regardé d’assez près.

Quand je me suis adressé à ce Parlement il y a cinq ans, je nous ai invités à mettre le multilatéralisme au service de la classe moyenne et de ceux qui travaillent fort pour en faire partie.

Pour éviter que les frustrations économiques donnent naissance au populisme, au nativisme, au protectionnisme et à une polarisation faisant place à des idées politiques extrêmes. 

Aujourd’hui, nous sommes confrontés à ces forces, qui en sont venues à menacer la paix, la justice, la vérité, la démocratie et la stabilité de notre monde.

Nous devons choisir la voie à suivre.

Depuis 2017, le monde a changé… beaucoup :

Une pandémie mondiale, qui a fauché plus de 6 millions de vies et perturbé le quotidien de tout le monde.

Une récession mondiale, dans laquelle des millions de personnes ont perdu leur emploi et beaucoup d’économies tentent encore de se rétablir.

Un monde qui, au lieu de les appréhender, subit les dangers des changements climatiques.

Une méfiance de plus en plus grande envers les gouvernements et les faits.

L’affaiblissement de nos institutions démocratiques.

Nous avons vu l’un de nos plus farouches défenseurs de l’ordre fondé sur des règles choisir de s’éloigner pendant quatre ans de l’OTAN, s’éloigner du multilatéralisme.

Et, maintenant, l’invasion criminelle du président Poutine d’une Ukraine souveraine, indépendante et démocratique.

Les gens ressentent une profonde incertitude face à l’avenir.

C’est une époque gouvernée par l’anxiété. Les gens aspirent à du leadership et à des solutions.

Malheureusement, de plus en plus de populistes cyniques essaient d’exploiter cette anxiété.

Ils prétendent avoir des solutions simples qui jouent sur la peur des gens. 

Même au Canada, où 90 % de la population est vaccinée et où la vision du pays est la paix, l’ordre et le bon gouvernement, des manifestations contre les vaccins et contre le gouvernement se sont transformées en barrages à nos frontières. 

Les leaders de ces convois ont su retourner les citoyens véritablement anxieux contre le système qui était le mieux placé pour les rassurer.

La démocratie, ce n’est pas un jeu.

Il n’y a tout simplement pas de solutions faciles aux problèmes abstraits et complexes auxquels nous sommes confrontés.

Cela ne veut pas dire que la voie à suivre n’est pas claire.

Rien n’est plus clair que la volonté des gens d’améliorer leur vie et celle de leurs enfants dans notre pays.

Et il n’y a aucune défense plus robuste contre les forces destructrices venant de l’extérieur de nos démocraties que l’unité inébranlable des partenaires aux vues similaires.

Au cours des 80 dernières années, nous avons collectivement établi et renforcé une série de règles et d’institutions afin d’accroître la stabilité et la prévisibilité dans les affaires internationales.

Nous l’avons fait pour protéger les gens, pour leur offrir les meilleures perspectives de paix, pour défendre leur dignité et leurs droits inaliénables, et pour faire en sorte qu’ils soient libres de choisir leur propre avenir.

Aujourd’hui, ces règles et institutions sont ouvertement menacées.

Vladimir Poutine a enfreint les préceptes les plus fondamentaux du droit international.

Et il tue maintenant des civils innocents en bombardant des hôpitaux et des immeubles résidentiels.

Ce mépris flagrant des lois et de la vie humaine constitue une menace immense pour l’Europe et pour le monde entier.

Le Canada, l’Union européenne et tous nos partenaires et alliés se trouvent à un moment charnière.

Nous ne pouvons pas échouer. Nous devons nous montrer à la hauteur. 

Alors, je m’adresse à vous, aujourd’hui, plus tout à fait un nouveau joueur.

En fait, il se pourrait que je sois l’un des leaders progressistes ayant servi le plus longtemps, ici.

Je ne prétendrai pas connaître toutes les réponses.

Ce que je sais, cependant, c’est que du travail nous attend, nous, dirigeants consciencieux, attentifs au bien-être à court et à long terme de leurs citoyens et voués à la démocratie et aux valeurs qui la sous-tendent.  

Et cela est plus important que jamais.

Le président Poutine estimait que la démocratie était faible. Nos désaccords et nos débats lui ont paru comme des faiblesses. Ce qu’il n’a pas compris, toutefois, c’est que la vigueur de nos débats et de notre engagement citoyen fait notre force.   

Et que la démocratie, dans les meilleures conditions, sera toujours plus forte que l’autoritarisme.

Mais si nous voulons être francs, et nous devons l’être ici : nous n’avons pas toujours excellé ces dernières années.

Le président Poutine pensait que nous étions divisés. Il pensait qu’il pourrait affaiblir l’Union européenne et l’OTAN.

Il a fait une erreur de calcul.

Et elle s’est retournée contre lui.

L’OTAN et l’Union européenne sont maintenant plus déterminées et unies que jamais.

Parce que toutes les personnes ici présentes qui sont vouées à la démocratie savent au plus profond d’elles que la démocratie ne survient pas par hasard.

Et elle ne survivra pas sans un effort volontaire et conscient.

Mes amis, je veux être bien clair : les Européens – y compris nos alliés en Europe de l’Est – peuvent compter sur l’amitié et le soutien total du Canada.

Le Canada dirige le groupement tactique de la présence avancée rehaussée de l’OTAN en Lettonie.

Cette mission regroupe 10 pays de l’OTAN.

Depuis cinq ans, des centaines de militaires canadiens sont déployés à des milliers de kilomètres de chez eux pour se positionner à deux cents kilomètres de la frontière russe.

Ils sont déployés en Lettonie parce que ce qui est important pour la sécurité de l’Europe l’est aussi pour la sécurité du Canada.

Récemment, nous avons annoncé que nous doublons notre déploiement à l’OTAN pour les années à venir.

Ces militaires ne défendent pas seulement la Lettonie et l’Europe de l’Est, ils défendent notre liberté, notre sécurité et toutes nos démocraties.

Nous ne pouvons pas laisser tomber l’Ukraine. Elle compte sur nous. Alors, servons-nous de toutes les ressources à notre disposition.

Le président Zelenskyy et moi avons parlé souvent des forts liens entre nos pays. Le Canada abrite la deuxième plus grande communauté ukrainienne, après la Russie.

Nous devons collectivement nous relever les manches et offrir une aide humanitaire aux familles touchées par cette guerre, et nous devons déjà commencer à penser aux investissements que nous devrons faire pour rebâtir l’Ukraine par la suite.

Nous devons tous continuer d’envoyer de l’équipement militaire et de l’aide létale pour aider les Ukrainiens à mener leur défense héroïque de leurs terres, mais aussi de tous les principes qui protègent les nôtres.

Et nous devons continuer d’imposer des sanctions sans précédent au président Poutine et à ses complices en Russie et au Bélarus pour accroître la pression autant que possible.

Nous devons nous assurer que la décision d’envahir un pays souverain indépendant est considérée comme étant un échec stratégique qui va mener à la perte du président Poutine et de la Russie.

L’attaque perpétrée par le président Poutine contre l’Ukraine est une attaque contre les valeurs qui sont à la base de toutes les démocraties. 

Il nous incombe de démontrer aux gens pourquoi ces valeurs sont si importantes – pas seulement pour les Ukrainiens, mais pour nous tous.

Nous devons renouveler notre engagement à renforcer nos démocraties.

Et exercer le leadership ancré dans des principes que les citoyens du monde entier recherchent.

Ce leadership doit permettre de consolider ce que les citoyens ont en commun au lieu de ce qui pourrait les diviser.

Le travail qui nous attend n’est pas de tout repos.

Mais avec les bons outils, nous pourrons y arriver.

Nous devrions nous rassurer en constatant tout le travail qui est déjà en route.

Ici même et dans les autres parlements d’Europe et du reste du monde.

Au Canada, notre gouvernement élabore actuellement une nouvelle mesure législative pour lutter contre les méfaits en ligne.

Cette année, le Canada assume la présidence de la Coalition pour la liberté en ligne, et nous comptons mettre l’accent sur la protection des droits de la personne, l’inclusion et la diversité dans l’espace numérique.

Ici à l’Union européenne, votre devise est « Unie dans la diversité ».

Au Canada, la diversité est aussi au cœur de qui nous sommes.

Bien sûr, nous savons qu’il y a toujours plus de travail à faire.

Mais sur les plans de la réconciliation avec les peuples autochtones, de la lutte contre le racisme systémique, de l’égalité des sexes, de la défense des communautés LGBTQ2, nous faisons des progrès.

Que ce soit en assurant la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ou en investissant pour soutenir les entrepreneurs des communautés noires.

Nous donnons les outils pour la croissance économique à ceux qui trop souvent ont été laissés pour compte.

Nous pouvons jouer un rôle positif dans la vie des gens, et nous devrions le faire.

Au Canada, comme dans tant de pays européens, nous avons réalisé des investissements considérables pour lutter contre la pandémie de COVID-19.

C’était la bonne chose à faire pour protéger notre population, et c’était la décision nécessaire à prendre pour garantir une relance économique forte et robuste.

Nous savons que lorsque nous investissons dans les gens, notamment dans les plus vulnérables, et lorsque nous faisons croître la classe moyenne et rendons la vie plus abordable pour tous, ce n’est pas que les individus qui en bénéficient, mais aussi le pays tout entier et les fondements de notre démocratie.

Que ce soient les conséquences immédiates de l’insécurité alimentaire, de l’inflation et des prix élevés de l'essence, ou que ce soient les conséquences à long terme des changements climatiques ou de la pandémie, les démocraties doivent être à leur meilleur pour pouvoir tenir les conversations difficiles et nécessaires pour trouver des solutions.

À propos de notre lutte contre les changements climatiques, la collaboration entre le Canada et l’Union européenne continue d’être essentielle.

Notre travail se poursuit pour accélérer la transition vers une énergie verte et renouvelable, pour respecter nos engagements de la COP26 et pour sécuriser nos chaînes d’approvisionnement, incluant nos chaînes d’approvisionnement pour les minéraux critiques. 

Il faut continuer d’agir ensemble pour bâtir un avenir plus propre et une économie plus résiliente.   

Les pays d’Europe partagent aussi les objectifs de réduire la pauvreté et les inégalités tout en faisant croître la classe moyenne.

Nous avons les mêmes aspirations pour un avenir meilleur, plus sûr et plus propre.

Les accords commerciaux progressistes comme l’Accord économique et commercial global aident nos économies à grandir et créent de bons emplois, tout en assurant des normes élevées pour les travailleurs, les consommateurs et l’environnement.

Notre capacité à unir nos forces malgré nos différences et à obtenir des résultats pour les gens était d’une importance capitale, et je vous en remercie.

Ayant le plus long littoral au monde, le Canada rejoint les océans Atlantique, Pacifique et Arctique.

Et nos liens avec le reste de l’Amérique sont forts.

Aux Nations Unies, nous sommes parmi les pays ayant le plus de liens avec le reste du monde : nous sommes membres de l’OTAN, du G7, du G20, du Conseil de l’Arctique, de l’APEC, de l’Organisation des États américains, du Commonwealth et de la Francophonie.

Nous avons beaucoup de travail à faire, et il sera essentiel de travailler en collaboration si nous voulons réussir à bâtir un avenir meilleur pour nos enfants et nos petits-enfants.

Cela exigera un effort constant, mais je suis convaincu que nous sommes à la hauteur.

J’ai confiance en la résilience de nos institutions. Et, surtout, j’ai confiance en nos citoyens.

Je peux l’affirmer en raison de ce que j’ai vu dans les quatre dernières semaines.

L’unité dans notre riposte concertée à cette invasion a été plus grande que tout ce que le président Poutine aurait pu imaginer.

Non seulement de la part de nos gouvernements, mais des citoyens de tous nos pays.

C’est cette énergie et cette détermination que nous devons garder en nous. L’Union européenne s’est mobilisée afin de défendre notre démocratie. Et, comme toujours, vous pouvez compter sur l’amitié et le plein appui du Canada, à chaque instant. 

Ensemble, nous devons soutenir les démocraties partout à travers le monde, incluant les plus fragiles, et lutter contre l’autoritarisme grâce à plus d’investissements et à plus de leadership.  

Nous devons appuyer les gens courageux comme le président Zelenskyy et les Ukrainiens qui luttent pour leurs droits.

Et nous devons poursuivre notre travail – chacun de nous – afin d’améliorer nos démocraties dans nos propres pays.  

Il y a cinq ans, nous voyions des nuages menaçants poindre à l’horizon.

Mais, aujourd’hui, nous voyons plus clair.

Continuons à combattre les mensonges par la vérité.

La peur par les faits.

La division par l’unité.

Aussi longtemps que nous ne tiendrons pas notre démocratie pour acquise –

Aussi longtemps que nous ferons des efforts chaque jour pour la renforcer –

Aussi longtemps que nos partenariats seront forts –

Nous pouvons croire en l’avenir.

Comme Volodymyr Zelenskyy l’a dit : « la lumière vaincra l’obscurité ».

Merci.