Transcription - Le PM Trudeau participe à une discussion publique avec des jeunes à Londres, au Royaume-Uni
Le PM Trudeau participe à une discussion publique avec des jeunes à Londres, au Royaume-Uni
SADIQ KHAN (maire de Londres) : Bienvenue à l’hôtel de ville. Qui est content d’être ici?
SADIQ KHAN : Oh, allez. Qui est content d’être ici?
SADIQ KHAN : Ok. Nous allons avoir une belle matinée. J’aimerais vous dire quelques mots, puis vous présenter nos deux invités. Vous êtes ici, aujourd’hui, parce que cette année nous menons une grande campagne intitulée « Behind Every Great City ». Derrière chaque grande ville se trouvent l’égalité, les possibilités, le progrès, et nous voulons absolument nous assurer de tirer parti de tout cela cette année, puisque cela fait 100 ans que les femmes ont le droit de vote. Et, maintenant, je vais faire monter sur scène – et vous voudrez sans doute tout casser quand je leur demanderai de s’approcher, et je devrai faire venir des gens pour tout réparer – je vais faire monter sur scène deux des féministes les plus connus dans le monde, qui sont en position de pouvoir, des gens d’influence, deux personnes extraordinaires. Ils vont rester quelques minutes pour partir le bal, puis ils prendront vos questions. Alors, j’aimerais que vous les applaudissiez bien fort quand je vais vous les présenter. D’abord, le premier ministre du Canada et, ensuite, la première ministre de la Nouvelle-Zélande. Alors, êtes-vous prêts?
AUDITOIRE : Oui.
SADIQ KHAN: Êtes-vous contents d’être ici?
AUDITOIRE : Oui!
SADIQ KHAN : Accueillons chaleureusement, comme seule Londres est capable de le faire, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau.
SADIQ KHAN : Nous pouvons faire mieux que ça. La première ministre de la Nouvelle-Zélande, Jacinda Ardern.
SADIQ KHAN : Justin et Jacinda ont bien gentiment accepté de répondre à autant de questions que leur emploi du temps le leur permet. C’est leur premier événement public, parce qu’ils ont hâte d’entendre les jeunes Londoniens et de répondre à vos questions. La semaine prochaine, à Parliament Square, nous allons dévoiler la première statue d’une femme. Qui sera des nôtres?
SADIQ KHAN : Excellent. Bon. Alors voici ce que nous allons faire : je vais parler à vos enseignants, pour ceux qui sont des étudiants, et vous pourrez venir aussi.
VOIX INCONNUE : Oui.
SADIQ KHAN : Nous allons répondre à vos questions. Mais avant cela, j’ai ici la liste des gens parmi vous qui voulaient poser une question. J’ai vos noms écrits ici. Laissez-moi vérifier : il y a des élèves de Heartlands High ici?
AUDITOIRE : Oui!
SADIQ KHAN : Malheureusement, ce n’était pas assez fort.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU (premier ministre du Canada) : Je ne pense pas qu’ils soient là. Ils ne sont vraiment pas là.
SADIQ KHAN : Ok, d’accord. Est-ce qu’il y a des élèves de Deptford Green alors?
AUDITOIRE : Oui!
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Il se pourrait qu’ils soient là.
SADIQ KHAN : St. Xavier et St. Olave?
AUDITOIRE : Oui!!
SADIQ KHAN : Oui, ils sont vraiment là.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Absolument.
SADIQ KHAN : Je vais donc demander au premier ministre du Canada, Justin, de dire quelques mots, puis nous allons demander à Jacinda, première ministre de la Nouvelle-Zélande, de dire quelques mots aussi, puis nous allons vous laisser la parole. Cela vous va? Justin, c’est à vous.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : L’une des merveilles de cet emploi est d’avoir la chance de rencontrer une immense diversité de personnes venant de tous les horizons. Mais, ce que je préfère, c’est de rencontrer des jeunes. Votre façon de poser des questions sur tous les sujets, de nous remettre en question, d’amener la société à penser différemment, à évoluer, à changer, à se remettre en question, c’est super important. Ça l’est en politique, mais aussi dans tous les domaines. Nous vivons à une époque d’intenses changements, où nous amenons les jeunes à prendre conscience que, contrairement à ce que tout le monde dit, ils ne sont pas les leaders de demain, mais les leaders d’aujourd’hui. Et ce que vous faites aujourd’hui, et les gestes que vous posez aujourd’hui, tout cela a une incidence très profonde. Et, aujourd’hui, nous allons parler d’une chose tellement importante : le fait que nous avons tous une voix, chacun de nous a une voix. Sur la question du féminisme, bien sûr, cela veut dire que nous devons nous assurer que les filles s’expriment fort, fièrement, mais cela veut aussi dire que les hommes doivent faire partie de la solution. Les garçons doivent s’exprimer haut et fort, être fiers de dire que, oui, nous sommes des féministes, parce que nous savons que les femmes et les hommes doivent être égaux et qu’il y a beaucoup de travail à faire. C’est ce que nous devons faire ensemble, et c’est pourquoi je suis heureux d’être ici pour répondre à vos questions.
SADIQ KHAN : Avant que je présente Jacinda, est-ce que je peux simplement dire ceci : elle a beaucoup de raisons d’être connue, mais ce dont je suis le plus fier est qu’elle a vécu pendant deux ans et demi à Londres. Une Londonienne est donc première ministre de la Nouvelle-Zélande, et j’ai nommé Jacinda Ardern.
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN (première ministre de la Nouvelle-Zélande) : Merci, Sadiq. Je suis devenue nerveuse quand vous avez parlé de célébrité, parce que je pense immédiatement à (inaudible) quand quelqu’un parle de cela. C’est vraiment extraordinaire d’être ici aujourd’hui, et j’aimerais surtout qu’on ait du temps pour les questions. J’aimerais donc vous entendre nous dire ce que vous souhaitez nous entendre dire. J’aurais cependant aimé dire ceci : félicitations pour votre centenaire du vote des femmes. En Nouvelle-Zélande, nous célébrons nos 125 ans...
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Vantarde.
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : J’allais donc dire que, bien que j’en sois très fière, nous devons toujours veiller à ne pas tomber dans la complaisance. Car vous le savez : même quand une femme accède au poste de premier ministre, cela ne veut pas dire que l’on a atteint l’égalité. Tant qu’il y aura des écarts salariaux, tant que les femmes occuperont plus d’emplois faiblement rémunérés, tant que des femmes seront susceptibles de subir de la violence familiale, nous aurons beaucoup de travail à faire. À mon avis, la question de l’égalité transcende plusieurs domaines. Je suis donc si heureuse de savoir qu’il n’y a pas de complaisance, parce que nous ne devons ménager aucun effort pour améliorer sans cesse les choses pour que vos enfants, nos enfants – je veux dire notre enfant, parce que si j’emploie le pluriel, Clarke devient tout à coup très nerveux –
Pour que la vie soit meilleure pour la prochaine génération. Je vous remercie donc de vous intéresser à ce sujet si important.
[Applaudissements]
SADIQ KHAN : Alors voilà, ni Justin ni Jacinda ne veut faire de longs discours et ils ne connaissent pas du tout les questions que vous allez poser, alors espérons que cette formule fonctionne. Les trois premiers noms que j’ai ici, juste les noms, pas les questions, la première série de questions revient à Nabila (ph) de Heartlands High, puis à Dixie Lee (ph) de Deptford Green et ensuite à Ty Ho (ph) de St. Xavier. Nabila, allez-y en premier. Où est Nabila? Le micro va se rendre jusqu’à vous. Je pense que l’enseignante de Nabila est là, prête à l’applaudir avant qu’elle pose sa question. Nabila, la première question est à vous.
QUESTION : Quels sont vos modèles féminins?
SADIQ KHAN : Excellente première question. Dixie Lee? Où est Dixie Lee? Ok. Attendez juste un instant, le micro est derrière vous. Tournez-vous.
QUESTION : Quel conseil donneriez-vous à une fille comme moi qui voudrait devenir première ministre?
SADIQ KHAN : Eh bien, Dixie, je suis content que vous ayez dit première ministre et non pas mairesse.
SADIQ KHAN : Ty Ho? Passez le micro à Ty Ho. C’est ça.
QUESTION : Bonjour. Ma question concerne les stéréotypes sexuels qui existent, quand nous grandissons. Les gens disent que les hommes ne peuvent faire que certaines choses et que les femmes peuvent en faire d’autres. Comment faire pour que les filles et les garçons aient les mêmes possibilités?
SADIQ KHAN : Jacinda, voulez-vous commencer, puis nous passerons à Justin après?
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : Bien sûr. Je vais essayer de répondre à toutes ces questions à la fois. À propos de mon modèle, vous verrez que ma réponse est assez quétaine, mais elle est vraie. Ma mère est un grand modèle pour moi. Je pense que nous sommes surtout inspirés par les personnes qui sont proches de nous. Tout ce qui m’a guidée, dans ma vie, les valeurs que j’ai et les principes qui me sont chers, je les appris de mes parents. Et ma mère m’a surtout transmis la gentillesse et la générosité. Vous savez, ma mère était toujours... vous savez, quand j’étais jeune, elle était responsable de la cafétéria de mon école. C’était vraiment pratique à l’heure du lunch, mais cela voulait aussi dire qu’elle devait faire beaucoup de sacrifices pour veiller à être là pour ma sœur et moi. Elle m’a enseigné des principes et des valeurs, comme prendre soin l’une de l’autre, et elle aurait toujours été la première à offrir une part de lasagne à quelqu’un qui en aurait eu besoin. Elle m’a probablement enseigné le principe qui me guide chaque jour dans mon rôle de dirigeante. Alors, oui, nous avons tous nos héros, des gens que nous n’allons peut-être jamais rencontrer, mais les héros de notre quotidien ont aussi des leçons très importantes à nous transmettre.
Un conseil à quelqu’un qui voudrait devenir premier ministre, excellente question. J’aimerais moi-même vous poser rapidement une question. Qui a un emploi de rêve en tête? Un emploi de rêve. Un emploi qui, vous en êtes absolument certain, serait le meilleur au monde si vous pouviez l’exercer. Un emploi de rêve. Ok. Est-ce le même emploi que vous pensez vraiment exercer? Quand je pose cette question dans mon pays, je suis toujours surprise de voir le nombre de mains qui redescendent et de constater que ce que vous aimez le plus faire au monde n’est pas nécessairement ce que vous pensez pouvoir faire plus tard. Le conseil que je donnerais à toute personne qui voudrait être premier ministre est le suivant : ne cessez jamais de croire que vous pouvez y arriver. Parce que le plus grand obstacle, je crois, et en particulier pour les femmes, si je me permets de généraliser, le plus grand obstacle à l’atteinte de nos buts est de penser qu’il est impossible d’y arriver. Plein de gens mettront des obstacles devant vous. Vous n’avez pas à être l’un d’eux. Alors gardez confiance en vous, car bien des gens que vous admirez ont peut-être eux-mêmes des problèmes de confiance, et je pourrais vous dire que j’étais l’un d’eux.
SADIQ KHAN : Puis-je vous poser une petite question? Quand avez-vous su que vous vouliez devenir première ministre?
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : Je ne l’ai jamais su.
SADIQ KHAN : Est-ce pour les raisons que vous avez mentionnées?
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : C’est seulement que... je n’ai jamais pensé à occuper un tel rôle. Je l’ai toujours dit bien ouvertement. Je pensais simplement que c’était un rôle réservé à d’autres. J’étais absolument convaincue de pouvoir l’occuper, mais je ne me suis juste jamais vue dans ce rôle.
SADIQ KHAN : Ok. Justin?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Je vais commencer par la dernière question, au sujet des stéréotypes sexuels que certains emploient et de ce que nous faisons pour vous montrer que vous pouvez faire tout ce que vous voulez. J’ai passé beaucoup d’années à militer pour les jeunes et, en vieillissant, j’ai continué à parler des jeunes en me ramenant dans le passé. Maintenant, je suis devenu papa, et quand je pense aux jeunes, je regarde mes enfants et je les projette dans l’avenir. Et l’une des choses dont j’ai pris conscience, et j’en ai beaucoup parlé, est qu’il est important que j’élève ma fille de façon à ce qu’elle comprenne qu’elle peut faire absolument tout ce qu’elle veut, qu’elle ne devrait se buter à aucun obstacle, qu’elle devrait avoir toutes les occasions dans le monde. Mais mon épouse, Sophie, qui est en fait l’un de mes modèles féminins et l’une de mes sources d’inspiration, il n’y a aucun doute là-dessus, m’a fait comprendre que c’est génial que j’élève ma fille pour qu’elle soit une féministe, qu’elle souhaite l’égalité des sexes et qu’elle sache qu’elle peut faire tout ce qu’elle veut, mais elle m’a conseillé d’élever aussi mes garçons pour qu’ils soient féministes et qu’ils soutiennent leur sœur et les filles du monde entier pour qu’elles sachent qu’elles peuvent faire tout ce qu’elles souhaitent.
Et nous devons changer les mentalités, non pas seulement celles des femmes, mais aussi celles des hommes, et intégrer les hommes à la conversation sur l’égalité des femmes. Quand on y pense, on se trouve dans une situation où les hommes profitent injustement d’une plus grande part des occasions et d’un plus grand pouvoir, une situation où leurs paroles et leurs actes ont plus de poids, parce qu’il existe un déséquilibre dans notre société. Les hommes doivent donc se servir de ce pouvoir et du poids qu’ils ont pour faire avancer l’égalité. Ils doivent faire partie de la solution. Les hommes doivent être des alliés, des partenaires et des défenseurs de la lutte en faveur de l’égalité, parce que, au bout du compte, c’est tout le monde qui y gagnera.
Et, bien entendu, je vais maintenant répondre à la question sur la décision de devenir premier ministre. Je suis entièrement d’accord avec tout ce que Jacinda a dit. Si vous y pensez bien, plusieurs chemins peuvent vous mener en politique. On se dit rarement : bon, je vais aller à l’école, étudier en sciences politiques, puis commencer à travailler sur ma campagne électorale. C’est bien l’un des chemins à prendre, et certains y parviennent comme ça, mais tout ce qui vous motive, qui vous passionne, qui vous fait nouer des liens avec d’autres et rassemble les gens, qui vous fait agir et changer le monde, tout cela peut vous mener à une activité politique et, si vous le souhaitez et si les circonstances le permettent, à la vie politique. Soyez ouverts à l’idée d’avoir un poids politique en étant des citoyens actifs et engagés, et vous serez étonnés de voir où cela peut vous mener.
Je vous parlerai enfin de la nécessité d’amener plus de femmes à vouloir devenir première ministre, à être en mesure de le devenir et à avoir du succès en politique. L’une des mesures que nous avons pu prendre, au Canada, a été de former un cabinet paritaire (moitié hommes, moitié femmes) pour notre gouvernement. Mais pour y arriver, j’ai essayé pendant plusieurs années de convaincre des femmes extraordinaires de partout au Canada de faire le saut en politique. Et ce que l’on constate, quand on pose la question à des gens extraordinaires – et j’ai demandé à des gens extraordinaires de différents horizons de se joindre à moi et d’entrer en politique – quand on demande à un homme s’il souhaite se lancer en politique, il commence souvent par demander pourquoi ça a pris autant de temps avant qu’on le lui demande. Il répondra alors quelque chose comme « C’est bien, j’en serais heureux ». Si vous posez la même question à une femme, il y a habituellement une pause, puis exactement comme Jacinda l’a dit, la réponse ressemble à « Êtes-vous sérieux? Vous pensez que j’ai ce qu’il faut? » On rencontre des femmes au CV épatant, qui ont une expérience à couper le souffle, mais le système dans lequel nous vivons fait en sorte qu’un doute persiste, que les femmes doutent de leur aptitude à réussir. Et nous devons choisir d’éliminer les obstacles qui existent, mais aussi de changer les mentalités. Et des conversations comme celles-ci sont essentielles pour y arriver.
SADIQ KHAN : Ok. Avant la prochaine série de questions, j’aimerais dire ceci. Il y a très peu de femmes dans notre Cabinet. Quand Justin est devenu premier ministre en 2015, le premier Cabinet qu’il a formé comprenait autant de femmes que d’hommes. Et quand on vous a posé la question, quelle a été votre réponse, Justin?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Eh bien, j’ai dit...
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : 20...
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Oui, j’ai dit qu’on était en 2015. Pourquoi un gouvernement doit être formé d’autant d’hommes que de femmes? Comme c’était une question ridicule, j’ai répondu que c’était comme ça. Parce que nous devions arrêter de croire que la parité était une vision d’avenir que nous devions atteindre. Nous devons agir concrètement dès maintenant pour y arriver. Et, ce qu’il y a de mieux avec un Cabinet paritaire, ce n’est pas l’image que cela renvoie, ce n’est pas l’indication que c’est faisable ou souhaitable de le faire, c’est plutôt les conversations que nous pouvons avoir, la teneur des débats que nous avons et les solutions que nous avançons, qui sont de meilleure qualité parce qu’elles proviennent d’un groupe plus diversifié. Et cela est fondamental.
SADIQ KHAN : Ok. La prochaine série de questions nous vient de la Deptford Green School. Patrick. Est-ce que quelqu’un pourrait passer le micro à Patrick? Ici, dans la première rangée, le garçon ici. Et la deuxième question ira à Kelly Parra (ph) de St. Xavier. Où est Kelly?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : À l’arrière.
SADIQ KHAN : Ok. Kelly est à l’arrière. Et la troisième question nous vient de Jamie McCarron‑Gammus (ph) de Heartlands High. Où est Jamie? Ok. Allez-y en premier. Oui, à vous.
QUESTION : Seriez-vous d’accord pour abaisser à 16 ans l’âge auquel on peut voter? Pourquoi serait-ce important, d’après vous?
SADIQ KHAN : Ok. Le vote commence à 18 ans au R.-U. en ce moment. Kelly?
QUESTION : Comment pouvons-nous contribuer à la lutte contre les inégalités entre les sexes?
SADIQ KHAN : Excellente question. Et la troisième question nous vient de Jamie.
QUESTION : Qu’est-ce que cela signifie, pour vous, d’être féministes?
SADIQ KHAN : Excellente question. Justin répondra en premier, puis ce sera au tour de Jacinda. Justin?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Nous parlons depuis longtemps, au Canada, des façons d’inciter plus de jeunes à voter parce que, depuis quelques années, de moins en moins de jeunes s’intéressent à la politique. Et certains ont proposé d’abaisser l’âge minimal pour voter ou de rendre le vote obligatoire comme dans certains pays. Nous pouvons prendre différentes mesures pour amener les jeunes à voter. Et j’ai essayé d’aborder la question sous un angle un peu différent. J’ai dit qu’au lieu de se pencher sur les symptômes du problème qu’est l’absence des jeunes dans les bureaux de vote, essayons de nous attaquer aux causes profondes. Pourquoi les jeunes ne votent-ils pas ou ne font-ils pas le saut en politique? Car je savais, en raison du travail que je faisais auprès des jeunes, que ce n’était pas parce qu’ils n’en avaient rien à faire de la politique ou parce qu’ils étaient cyniques ou indifférents face au monde. Et, si je dénotais de l’indifférence ou de la frustration, ce n’était jamais parce qu’ils ne se préoccupaient pas du monde. C’est surtout parce qu’ils sentaient qu’ils n’avaient pas les outils nécessaires pour changer véritablement le monde, ce qui occasionne des frustrations. C’est pourquoi nous avons cru important de faire participer les jeunes à la conversation, de les mobiliser dans le monde politique, et non pas seulement comme bénévoles ou préposés aux enveloppes, mais de les intégrer à la conversation pour que nous puissions discuter des façons d’améliorer notre société à long terme. Des façons de nous attaquer aux grandes questions d’avenir qui intéressent le plus les jeunes, comme l’avenir de la technologie, l’environnement, les droits de la personne, le Canada et le monde. Les jeunes voulaient parler de ces grands enjeux parce que ce sont ceux qui sont les plus importants à leurs yeux, et non pas les changements que nous apportons au régime fiscal qui pourraient, ou pas, changer vraiment le monde.
Nous avons donc eu assez d’audace pour lancer de grandes conversations, le vent a tourné et cela a attiré les jeunes, de sorte qu’ils ont davantage voté sans que nous ayons eu à abaisser l’âge minimal pour voter. Cependant, nous avons un excellent programme, au Canada, qui invite des élèves du secondaire qui n’ont pas encore l’âge de voter à participer à une simulation d’élections complètes pour s’habituer à aller voter, même si leur vote ne compte pas pour le moment. Ils entrent dans le processus politique et commencent à y penser, de sorte que, quand ils atteignent l’âge de 18 ans, ils sont prêts à aller voter.
SADIQ KHAN : Comment voyez-vous les choses en Nouvelle-Zélande? Est‑ce que l’âge est de 18 ans en Nouvelle-Zélande?
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : Oui. Et nous connaissons nous aussi un problème de participation, mais, en fait, nous avons un problème de participation des jeunes depuis un certain nombre d’années. Ce n’est pas nouveau, mais cela nous inquiète. Cela nous inquiète, parce que cela veut dire qu’il y a sous-représentation; que la voix des jeunes n’est pas entendue. Et je dirais deux choses à ce sujet. Je suis d’accord avec Justin sur le fait que, vous savez, l’un des problèmes que je perçois en Nouvelle-Zélande est que nous avons le syndrome du planchodrome. On sort et on va demander aux jeunes ce qu’ils penseraient qu’on construise un planchodrome dans leur communauté, parce que, c’est bien évident; c’est ce qui intéresse les jeunes. Vous savez, quand je vais dans les écoles, et c’est l’une des choses que je préfère, et que je parle des enjeux dont les jeunes veulent parler, la plupart du temps il est question de pauvreté chez les enfants, d’inégalités, de changements climatiques. Des grands enjeux que nous abordons au gouvernement, mais dont nous ne parlons probablement pas suffisamment; nous n’en faisons pas suffisamment pour montrer que nous prenons les gestes que les jeunes veulent réellement nous voir prendre. Alors, pourquoi un jeune irait-il voter s’il perçoit que son représentant ou son candidat ne fait rien au sujet des enjeux qui lui tiennent à cœur? C’est l’un des éléments; parler de ces enjeux qui comptent vraiment est le premier élément.
Et le deuxième élément, cependant, est qu’à mon avis, nous ferions fausse route en tenant pour acquis que le vote est le seul moyen dont les gens disposent pour avoir du pouvoir. Parmi les gens qui m’écrivent, les enfants du primaire sont probablement le plus vaste groupe. Je reçois des tas de lettres d’enfants. En fait, nous avons dû embaucher quelqu’un pour m’aider, particulièrement avec les lettres d’enfants que je reçois, ce que je trouve d’ailleurs merveilleux, parce que cela veut dire qu’au terme d’un long... habituellement, lorsque je sors de la... en Nouvelle-Zélande, nous avons une période de questions. Les débats y sont vraiment bruyants et très vifs, alors chaque fois que je me rends à la période de questions, je réponds à beaucoup de questions de l’opposition. L’une des choses que je fais consiste à apporter mon dossier de lettres d’enfants à la chambre des débats. Alors, quand je finis de répondre à toutes les questions qu’on me crie, je regarde des photos et des dessins d’enfants. Et ils ne m’envoient pas seulement des visages heureux et souriants. Le plus souvent, ils m’expriment leurs inquiétudes face au monde. Des tortues avec des pailles dans le nez, des sacs de plastique dans la mer. Ils se préoccupent profondément des enjeux dont beaucoup de gens parlent. Nous aurions tort de croire que les enfants et les jeunes sont différents des autres. Quoi qu’il en soit, ces lettres ont une influence sur moi. J’en parle maintenant, parce que je les vois si souvent. Les pétitions ont un pouvoir. Les lettres ont un pouvoir, et aucun âge n’est imposé pour cela dans mon pays. Un jeune de 16 ans pourrait déposer une pétition au Parlement, et forcer le Parlement à l’examiner. Il n’est pas essentiel de voter pour avoir du pouvoir. Alors, en ce qui me concerne, ma tâche est de veiller à ce que les gens connaissent les outils mis en place dans notre système pour leur permettre de changer les choses.
SADIQ KHAN : Autre question, et vous êtes tous deux des premiers ministres ayant un pouvoir immense. Comment pouvons-nous combattre les inégalités entre les sexes? Il s’agit d’un enjeu énorme.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Nous avons commencé à regarder les choses dans l’optique de l’égalité des sexes dans à peu près tout ce que nous faisons, en ayant conscience que les politiques mises de l’avant par un gouvernement ont des conséquences différentes sur les hommes et sur les femmes. Il faut aussi penser à l’intersectionnalité; lorsqu’une femme appartient à une minorité visible ou à la communauté LGBTQ, on se retrouve avec des couches de discrimination qui peuvent s’accumuler, et nous devons être réellement sensibles à tous les défis qui touchent les gens de façon différente. Et quand on commence à réfléchir aux conséquences de tout ce qu’on fait en tant que gouvernement du point de vue de la diversité, de l’égalité des sexes, on trouve soudainement des solutions qui ne sont pas seulement, vous savez, meilleures ou plus populaires; elles sont habituellement plus judicieuses. Et l’un des points importants que nous avons soulignés est que l’égalité des sexes n’est pas seulement un enjeu sociétal ou moral; c’est en fait un enjeu purement et éminemment économique. Donner à toute une moitié de la population des occasions de pleinement contribuer, diriger et atteindre son plein potentiel est le seul moyen pour l’ensemble d’une société de libérer son potentiel.
Alors, veiller à faire des choses qui, oui, ont trait aux enjeux plus traditionnels liés à l’égalité des sexes, comme la violence conjugale ou la garde d’enfants, ou aux enjeux comme cela, oui, c’est important. Mais il s’agit aussi de réfléchir à... à peu près tout le reste du point de vue de l’égalité des sexes. Prenons l’exemple des projets de construction en zone rurale : si on construit une autoroute qui traverse une zone rurale, eh bien, il faut penser qu’on enverra un nombre important de travailleurs de la construction qui, pour la plupart, seront des hommes, dans des villages et des communautés éloignées, et que cela aura une incidence sur cette communauté en ce qui a trait à la violence... à des enjeux liés à l’égalité des sexes. Nous devons aussi réfléchir aux moyens de veiller à ce que, par le biais d’une loi proactive sur l’équité salariale, les femmes reçoivent le même salaire que les hommes pour un emploi semblable.
Le Canada en a beaucoup fait, en mettant sur pied un Cabinet paritaire, avec le budget axé sur l’égalité des sexes que nous avons déposé – en 2018, tout notre budget est élaboré dans l’optique de l’égalité des sexes – il y a quelques mois. Mais quand on regarde vraiment les chiffres, on voit qu’il y a beaucoup moins de femmes que d’hommes au Parlement, qu’il y en a beaucoup moins dans les conseils d’administration, et que nos résultats sont plutôt faibles quant à la parité des sexes dans le marché du travail. Alors, nous sommes conscients qu’il y a des choses dont nous parlons très efficacement, il y en a d’autres sur lesquelles nous travaillons, mais il nous reste un long chemin à faire. Et le commentaire que Jacinda a fait au sujet de la complaisance, ainsi que le fait d’être conscients de la nécessité de nous mettre au défi de faire mieux et de penser constamment à cela est le seul moyen d’éliminer les écarts en matière d’égalité des sexes.
SADIQ KHAN : Jacinda, une autre question sur ce que le féministe signifie pour vous, alors.
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : Le féminisme signifie… Qui croit en l’égalité? Qui croit en l’égalité? Vous êtes tous féministes parce qu’à mon avis, voilà en quoi cela consiste, dans sa forme la plus simple. Voilà ce qu’est le féminisme. C’est ce simple concept d’équité. Cela dit, énormément de stéréotypes sont rattachés à ce mot. Énormément. Nous parlions de quelques-uns d’entre eux plus tôt, et vous aviez tous une très bonne idée de tous les stéréotypes associés à ce seul mot, un mot dont l’histoire est tellement chargée. Une histoire immense, différents mouvements à différentes époques, mais, lorsqu’on va au fond des choses et qu’on le simplifie, le féminisme se résume à l’équité et à l’égalité.
Ainsi, cela veut dire que le travail que nous devons accomplir recoupe de très nombreux domaines. Et l’une des choses qui me frustrent parfois est l’idée que le seul marqueur dont nous disposons est la représentation des femmes. Nous avons eu presque 40 p. 100 de femmes dans notre Parlement en Nouvelle-Zélande. C’est le pourcentage le plus élevé que nous ayons eu. En ce moment, nous avons une femme au poste de gouverneure générale. Je suis une femme, évidemment, une première ministre, une juge en chef de la famille. Cela veut-il dire que notre travail est terminé? Non. Parce qu’encore une fois, comme je l’ai dit, les mesures qui comptent beaucoup pour moi ont trait à la vie quotidienne et à ce que vivent les femmes en milieu de travail et dans leur vie de chaque jour. Et cela ne concerne pas seulement les politiciens; cela nous concerne tous. Alors c’est pour cela que, selon moi, le féminisme concerne tout le monde. Cela concerne les hommes et les femmes, et cela consiste à faire en sorte que tout le monde, peu importe son milieu de travail ou son école, se voit véritablement offrir une juste chance, et nous essayons simplement de nous débarrasser de certains de ces comportements si démodés.
SADIQ KHAN : Nous allons passer à la prochaine série de questions. Nous avons Zarielle, (ph) Adiola, (ph) et Catian(ph). Où est Zarielle, de Heartlands?
QUESTION : Bonjour. Je voudrais savoir ce que l’égalité signifie pour vous, et de quelle façon elle peut se traduire dans la société.
SADIQ KHAN : Désolé. Pouvez‑vous répéter?
QUESTION : Qu’est-ce que l’égalité signifie pour vous?
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : L’égalité.
QUESTION : Et de quelle façon elle peut se traduire dans la société?
SADIQ KHAN : Parfait. Et Adiola?
QUESTION : Bonjour. Je voulais vous féliciter pour votre grossesse.
SADIQ KHAN : Merci beaucoup.
QUESTION : Et ma question est la suivante : que pensez-vous des préjugés envers les femmes en politique?
SADIQ KHAN : Cela s’adresse clairement à vous.
Catian, de Deptford Green?
QUESTION : Merci. Voici ma question : que devrait-on faire au sujet de l’écart salarial entre les hommes et les femmes, et que faites-vous à cet égard?
SADIQ KHAN : Excellent. Excellentes questions. Voulez-vous...?
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : Oui, je vais commencer. Au sujet de l’écart salarial entre les hommes et les femmes, nous travaillons actuellement sur une mesure législative pour faire en sorte de véritablement donner aux gens un mécanisme qui leur permettra d’éliminer l’écart salarial... pour être certains que nous pouvons résoudre certains de nos problèmes en matière d’équité salariale. Nous le faisons de différentes façons, et cette loi sera l’une d’elles. Mais je laisserai peut-être Justin en dire un peu plus à ce sujet lui aussi.
En fait, il n’y a pas si longtemps, nous avons eu une cause qui a fait jurisprudence dans laquelle des préposés aux soins à domicile, des gens qui s’occupent des personnes âgées, ont entamé une démarche où ils ont vraiment remis en question l’idée qu’ils touchaient un juste salaire, et le tribunal a penché en leur faveur. Et cela a entraîné une énorme augmentation salariale pour ces gens, en majorité des femmes, qui travaillent comme préposés aux soins à domicile. Voilà le genre de choses que nous essayons de faire, mais sans être obligés de nous rendre devant les tribunaux pour y parvenir.
Quant aux questions d’inégalités... aux questions qui ont trait à la politique, j’ai de la chance. Je suis la troisième femme à avoir été première ministre dans mon pays. La troisième. C’est vraiment remarquable, quand on pense à certains autres pays, et aux pays qui en ont élu une pour la première fois. Nous en sommes à notre troisième. Et je dois dire que ces femmes ont vraiment préparé le terrain pour moi. Elles ont fait une énorme différence dans ce que je vis aujourd’hui dans le cadre de mon leadership. Cela dit, j’ai probablement connu autant de moments difficiles à l’extérieur de la politique que j’en connais maintenant. Je me souviens encore de l’un de mes tout premiers emplois. Ma première patronne, une femme, m’a dit que je n’aurais jamais de promotion tant que je ne me couperais pas les cheveux. Je ne les ai jamais coupés depuis. Je suis comme Samson, maintenant. C’est vraiment une question de principe.
SADIQ KHAN : Si je puis me permettre, Justin a eu le même problème.
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : Parce qu’elle trouvait que je n’avais pas l’air sérieux et qu’on ne me prendrait jamais au sérieux comme femme si j’avais les cheveux longs. Je sais que c’est un petit exemple banal, mais je m’en sers pour dire que oui, en politique, je rencontre un peu ce genre de situations ici et là, mais, lorsque cela se produit, beaucoup de gens se portent à ma défense. Quand j’étais dans ce milieu de travail, personne d’autre que moi ne pouvait le faire, et c’était sans doute plus difficile à de nombreux égards. C’est pourquoi je suis très consciente que même si nous semblons faire le ménage aux échelons élevés, nous devons penser aux autres milieux de travail aussi, et nous devons prendre soin les uns des autres dans ces milieux de travail. Voilà peut-être pourquoi, par conséquent, ce que je vis n’est pas aussi difficile que d’autres personnes que j’ai vues.
J’ajouterai finalement que lorsque j’ai été élue comme chef du Parti travailliste en Nouvelle-Zélande, j’étais la plus jeune membre de ce caucus et j’étais une femme, et tous les députés de mon équipe m’ont appuyée. Alors, le fait d’être entourée d’une équipe formidable peut également changer bien des choses.
SADIQ KHAN : Excellente réponse. Justin?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Au sujet de l’écart salarial entre les sexes, je pense qu’il est important de prendre conscience de ce qu’est l’écart salarial. Ce n’est pas un cas où, en allant à la banque, on se retrouve devant deux caissiers dont l’un est un homme et l’autre est une femme et où les deux ne touchent pas le même salaire, même s’il y a effectivement un problème s’ils touchent des salaires différents en ayant la même ancienneté, le même nombre d’années d’expérience, le même emploi. C’est dans le cadre de différents types d’emplois. Jacinda a parlé des préposés aux soins à domicile qui, pour la majorité, sont des femmes, mais cette profession pourrait demander le même niveau de formation et comporter le même degré de difficulté qu’un emploi d’ingénieur en bâtiment ou dans un établissement de détention, ou qu’un métier principalement exercé par des hommes. Alors, il s’agit de comparer différents types d’emplois et de constater que si tel métier regroupe majoritairement des femmes et que tel autre est surtout exercé par des hommes, et que les deux comportent le même degré de difficulté, et c’est plutôt compliqué, ou exigent le même degré de qualité ou de valeur, il faut s’assurer que si, en ce moment, les femmes qui occupent ces emplois sont habituellement sous-rémunérées, leur salaire soit haussé de manière à ce que ce soit plus juste pour tout le monde. Et c’est une chose assez compliquée à faire dans la société. Nous le faisons dans notre fonction publique. Nous allons également de l’avant avec un projet de loi sur lequel nous travaillons. Nous devrions comparer nos notes sur nos façons de procéder. Mais, en fait, ce qui nous facilite un peu la tâche est que les grandes entreprises sont maintenant beaucoup plus informatisées, technologiques, et que les services de ressources humaines sont tous branchés en ce qui a trait aux salaires. Il y a une plus grande transparence quant à qui touche quel salaire, et nous pouvons constamment faire des vérifications. L’équité salariale ne se résume pas à faire adopter une loi et à dire d’accord, vous devez tout ajuster. Il faut répéter et revérifier par intervalles de quelques années pour être certains de s’améliorer chaque fois. Ce n’est pas une fin; c’est un processus, et ce sera très, très important de le faire.
Au sujet des femmes, de la politique et des préjugés, nous traversons, en politique, au Canada et partout dans le monde, le même phénomène que celui qui se produit à Hollywood, dans le secteur bancaire et, vous savez, dans tellement de secteurs différents, c’est‑à‑dire le mouvement « Moi aussi », un sentiment que cela suffit et que le harcèlement en milieu de travail est inacceptable où que ce soit, sous quelque forme que ce soit. Et le fait d’adopter a priori une position selon laquelle on soutient et on croit quiconque révèle une histoire de harcèlement peut sembler simple, mais c’est très, très important. Lorsqu’une personne, habituellement une femme, révèle avoir été harcelée, intimidée ou agressée sexuellement au travail, nous devons, comme société, apprendre bien davantage à les croire, à les appuyer et à cheminer avec elles là-dedans. Il reste encore énormément de stigmatisation et de défis, et il faut davantage révéler cela au grand jour et composer avec cela par le biais de processus véritablement encourageants et justes.
Et le bon vieux club des garçons, et ce réflexe de, vous savez, balayer le tout sous le tapis, nous devons l’éliminer, et nous avons franchi de grands pas à cet égard au Parlement. Mais il reste d’énormes défis, parce que le harcèlement et les agressions sexuelles s’inscrivent souvent, voire toujours, dans une dynamique de pouvoir, et la politique est une structure hautement hiérarchisée où se côtoient une énorme dynamique du pouvoir et de jeunes bénévoles, ainsi que des gens qui risquent de perdre leur emploi pour des raisons aléatoires. Nous avons tous un immense travail à accomplir, mais il nous faut d’abord nous lever tous ensemble pour dire clairement et d’une voix forte que ce comportement est inacceptable et qu’il doit cesser. Et c’est cela que votre génération doit comprendre et ce à quoi elle doit participer, susciter le changement, parce que, vous savez, certaines générations plus anciennes n’ont pas encore compris.
SADIQ KHAN : Quelqu’un à l’arrière me disait-il que... désolé, cela doit vouloir dire que c’est tout le temps que nous avions.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Nous sommes directement devant la Tour de Londres, alors nous aurions probablement avantage à ne pas faire cela.
SADIQ KHAN : Alors, permettez-moi d’abord de dire quelques mots. J’aimerais laisser à Jacinda et à Justin 30 secondes chacun pour conclure, parce qu’ils ont vraiment un horaire extrêmement chargé. Il y a 53 différents chefs de gouvernement ici, à Londres. Ils ont des rencontres prévues avec certains d’entre eux. Ils doivent rencontrer la famille royale, la première ministre, des membres du Cabinet, et ils ont trouvé du temps pour venir écouter de jeunes Londoniens et pour leur parler. Alors, avant de vous demander, Jacinda et Justin, de dire quelques mots, je vous demanderais de remercier, comme Londres sait si bien le faire, la première ministre de la Nouvelle‑Zélande et le premier ministre du Canada, Justin et Jacinda.
SADIQ KHAN : Maintenant, avant de céder d’abord la parole à Jacinda, lorsque nous aurons terminé, nous sauterons en bas... si c’est possible, nous sauterons tous en bas pour prendre une photo...
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : Je vais utiliser l’escalier.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Descendez prudemment l’escalier, oui.
SADIQ KHAN : Nous prendrons une photo que nous vous enverrons, et tout. Alors, Jacinda la parole est à vous.
LA TRÈS HON. JACINDA ARDERN : Je serai très brève. Je voulais simplement vous remercier de votre intérêt. Merci de votre intérêt à l’égard d’enjeux très importants peu importe où l’on vit dans le monde. Et, en fait, je dis la même chose que ce que Justin affirme assez souvent. Cette question de « leaders de demain » me frustre. Personne ne sait ce que signifie le fait d’être un jeune de 15, 16, 17 ans qui vit à Londres en 2018, mais vous, vous le savez. Votre expérience est unique. Vos points de vue, par conséquent, sont importants. Alors, ne laissez jamais personne vous dire le contraire.
Je me suis jointe à un mouvement politique pour la première fois quand j’avais 17 ans et, parce que je voulais changer le monde, j’ai commencé en distribuant des dépliants. Vous pouvez commencer en faisant n’importe quoi, et vous ne savez jamais où ce parcours vous mènera. Alors, ne laissez personne diminuer l’importance de vos opinions.
Et finalement, vous vivez dans une ville formidable. J’ai aimé vivre à Londres. J’ai habité à Brixton et à Vauxhall lors de mon dernier séjour à Londres. J’ai adoré vivre ici. Il y a beaucoup de choses dont vous pouvez être fiers dans votre ville. La diversité est l’une d’entre elles. Mais votre maire est plutôt génial aussi, alors merci de nous avoir accueillis.
SADIQ KHAN : Merci. Justin?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Mon message est très semblable à celui de Jacinda. Vous êtes importants. Ce que vous faites est important, et l’égalité est évidemment importante pour nous tous. Le concept de justice est enraciné dans l’être humain. Nous voulons que le monde soit juste, même si, à bien des égards, il ne l’est pas. Dans les moyens à prendre pour le rendre plus juste, vos paroles comptent. Vos gestes comptent. Si vous voyez quelqu’un rire de quelqu’un d’autre ou l’intimider, réagissez, intervenez. Si vous avez la capacité de changer la façon dont les gens pensent, de remettre en question le monde qui vous entoure et de réunir des gens autour de vous pour relever le défi de faire ce qui doit être fait, soyez courageux, soyez audacieux, cherchez des moyens d’avoir une influence en vue de façonner le monde qui vous entoure. Le monde sera tout ce que vous en ferez, et vous devez comprendre que vous avez le pouvoir de façonner le monde.
Et finalement, vous savez, comme nous l’avons souvent entendu, vous ne définirez pas votre propre réussite et votre bonheur par ce que vous retirez du monde, mais plutôt par la façon dont vous édifiez le monde autour de vous, par l’influence que vous avez sur le monde et la façon dont vous apportez une signification et une pertinence à votre vie grâce à votre manière d’influencer et de façonner votre communauté. Alors, sachez que les choix que vous faites ne façonnent pas uniquement votre vie; ils façonnent l’ensemble du monde dont vous faites partie. Et cette occasion de vous voir, de vous entendre et d’être inspirés par vous au moment où nous nous apprêtons à aller discuter avec tout un tas de différents chefs de gouvernement, d’être en communication avec chacun de vous, est pour moi la meilleure des manières de commencer la journée d’aujourd’hui et n’importe quelle autre journée.
Merci de continuer à m’inspirer et à me rassurer sur le fait que notre avenir et notre présent sont entre de très bonnes mains.
SADIQ KHAN : Justin, Jacinda, merci beaucoup.