Transcription - Le premier ministre Trudeau prononce une allocution à la Chambre des députés italiens
Le premier ministre Trudeau prononce une allocution à la Chambre des députés italiens
Buongiorno, honorable Présidente Boldrini, honorable Président Grasso, honorables députés et sénateurs, invités de marque et, bien entendu, citoyens de l’Italie.
Sophie et moi vous remercions pour le chaleureux accueil. Toutes les personnes que nous avons rencontrées dans votre beau pays nous ont rapidement fait sentir chez nous, ce qui illustre l’hospitalité légendaire du peuple italien et la capacité des Canadiens à savoir quand ils sont devant un bon repas. Mais blague à part, merci encore. Votre accueil cordial traduit bien l’amitié de longue date entre nos pays.
Il y a à peine quelques jours, le premier ministre Gentiloni et moi avons rencontré nos homologues à la réunion des dirigeants de l’OTAN, puis nous avons assisté aux réunions du G7 dans la belle ville de Taormine. Nous avons réalisé des progrès ensemble pour nos citoyens. Nous nous sommes basés sur nos valeurs communes pour améliorer notre sécurité collective et créer de l’emploi dans nos pays. Nous savons que ce sont les gens qui font notre succès – des gens créatifs, curieux, novateurs et riches de leur diversité, qui travaillent fort, mais qui trouvent toujours du temps pour ce qui compte vraiment, comme passer du temps en famille ou débattre de politique.
Cependant, nous avons plus que cela en commun. Nos deux pays savent que s’il est question de sécurité mondiale, la coopération internationale est la meilleure façon de parvenir à la paix et à la prospérité. Nous savons que le commerce est essentiel à la création de bons emplois qui renforcent et font croître notre classe moyenne, qui est au cœur de l’économie ici, en Italie, comme chez nous, au Canada. Ce sont là les liens qui unissent nos pays aujourd’hui, comme cela a été le cas pendant des siècles.
En bon Canadien, je vais passer au français maintenant. Je sais que nous avons des services de traduction anglaise seulement, alors je répéterai dans l’autre langue pour que vous ayez un bon portrait d’ensemble.
Tout a commencé en 1497 lorsque Giovanni Caboto, un fier Vénitien, envoyé par le roi d’Angleterre, a accosté sur la côte est du Canada après avoir traversé l’Atlantique. Au début, seuls quelques Italiens aventuriers ont quitté l’Italie pour le Canada, attirés par les occasions d’affaires et refusant de reculer face à un climat peu clément.
À l’aube des années 1 900, moins de 2 000 Italiens vivaient au Canada. Ce nombre a augmenté de façon considérable dans les années avant la Première Guerre mondiale, mais après celle-ci, la migration a ralenti, en partie à cause des restrictions discriminatoires mises en place par le gouvernement canadien à l’époque. Par la suite, nos pays ont subi d’énormes changements en raison de la violence de la Deuxième Guerre mondiale. Quatre-vingt-treize mille Canadiens ont traversé l’océan afin de se battre pour la libération de l’Italie, et je suis fier de dire que mon grand-père, James Sinclair, était l’un d’eux, basé en Sicile. Près de 6 000 Canadiens ne sont pas revenus chez eux. Ils sont enterrés ici, dans la terre qu’ils ont libérée au prix de leur vie.
Tout a commencé en 1497 lorsque Giovanni Caboto, un fier Vénitien, envoyé par le roi d’Angleterre, a accosté sur la côte est du Canada après avoir traversé l’Atlantique. Au début, seuls quelques Italiens aventuriers ont quitté l’Italie pour le Canada, attirés par les occasions d’affaires et refusant de reculer face à un climat un peu moins clément qu’ici.
À l’aube des années 1 900, moins de 2 000 Italiens vivaient au Canada. Ce nombre a augmenté de façon considérable dans les années avant la Première Guerre mondiale mais après celle-ci, la migration a ralenti, en partie à cause des restrictions discriminatoires mises en place par le gouvernement canadien à l’époque. Par la suite, nos pays ont subi d’énormes changements en raison de la violence de la Deuxième Guerre mondiale. Quatre-vingt-treize mille Canadiens ont traversé l’océan afin de se battre pour la libération de l’Italie, et je suis fier de dire que mon grand-père, James Sinclair, était l’un d’eux, basé en Sicile. Près de 6 000 Canadiens ne sont pas revenus chez eux. Ils sont enterrés ici, dans la terre qu’ils ont libérée au prix de leur vie.
Dans les décennies qui ont suivi la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le taux d’immigration au Canada a bondi. Les Italiens sont arrivés au Canada par centaines de milliers après la guerre. Vos familles ont travaillé fort et ont sacrifié beaucoup. Votre éthique de travail a permis de bâtir nos villes. Votre créativité a embelli nos galeries d’art. Vos jugements ont défini nos cours de justice. Vous êtes devenus les plus fiers Canadiens, tout en réservant à La Patria une place spéciale dans votre cœur.
Nous avons été témoins de cela il y a à peine quelques semaines, lorsque des chefs d’entreprises italo-canadiens ont uni leurs forces pour soutenir le Fonds de secours pour les victimes des séismes en Italie et recueillir des dons pour venir en aide aux personnes qui se remettent encore des séismes dévastateurs de l’an dernier. C’est avec fierté que j’ai pris part à cet événement, aux côtés de nos nombreux députés italo-canadiens si talentueux et travaillants, et que j’ai annoncé l’intention du gouvernement d’offrir jusqu’à 2 millions de dollars en fonds de contrepartie.
L’intervention d’urgence que la Croix-Rouge italienne et ses organismes de bienfaisance partenaires, notamment ceux dirigés par le Vatican, ont menée à la suite du séisme n’a pas seulement aidé à remettre des communautés sur pied, mais aussi à sauver des vies. Nous sommes honorés de pouvoir les aider puisque, quand arrive une tragédie, nous demeurons solidaires. C’est ce que font les amis.
Sophie, qui est des nôtres ce matin, et moi sommes allés à Amatrice dimanche. Ce fut un honneur de constater l’incroyable volonté de rebâtir. Dans mon rôle de premier ministre, j’ai vu trop de communautés subir les effets des catastrophes naturelles, que ce soit des inondations, des feux de forêt ou des tempêtes de verglas. La force et la résilience des survivants sautent toujours aux yeux. J’ai vu ce courage à Amatrice. Cette force de caractère et ce dévouement envers la communauté sont si chers aux Italiens, mais aussi aux Canadiens.
C’est parce que les Canadiens et les Italiens ont des valeurs en commun, ce qui fait de nous ce que nous sommes. Il en va de même pour nos espoirs et nos rêves, nos soucis et nos inquiétudes. Vous voyez, nous voulons tous laisser à nos enfants et à nos petits-enfants un monde meilleur que celui dont nous avons hérité de nos parents; un monde plus propre et plus prospère, où tous ont une chance réelle et égale de réussir; un monde où la classe moyenne est forte et en croissance et où tous ceux et celles qui travaillent fort pour s’y joindre peuvent avoir l’assurance que leurs efforts porteront leurs fruits. Voilà les rêves que nous avons en commun.
Mais il y a aussi des gens, au Canada, et ici, en Italie, qui se sentent incertains et craintifs face à l’avenir. C’est compréhensible. Le monde évolue rapidement et il est normal que les gens se préoccupent de ce que leur réserve l’avenir, à eux et à leurs enfants.
Ce n’est qu’un petit exemple, mais pensons à la technologie mobile. Je me souviens de l’époque où il fallait brancher une calculatrice dans une prise murale; où une caméra vidéo pesait 40 livres et où il fallait la transporter sur son épaule; de l’époque où le courrier était un objet matériel qui prenait des jours – d’accord, parfois des semaines – à livrer. Mes enfants n’ont jamais connu l’époque où tous ces objets ne pouvaient pas tenir ensemble dans une même poche. C’est dire à quel point nous nous sommes habitués à ce qui semblait impossible il y a seulement une génération. Le rythme du changement n’a jamais été aussi rapide et, pourtant, il ne sera jamais plus si lent.
Pas étonnant que les gens s’inquiètent de leur emploi, de leur famille. Auparavant, du moment qu’on pouvait trouver un emploi dans une usine, tout allait bien. On pouvait épargner pour payer les études des enfants et mettre un peu d’argent de côté en prévision de sa propre retraite. Mais aujourd’hui, avec l’automatisation, ce type de travail stable est dur à trouver. Ces emplois sont en train d’être remplacés par de nouveaux types d’emplois, qui exigent de nouvelles compétences, le genre de compétences qu’il faut constamment mettre à jour. C’est la réalité du monde dans lequel nous vivons.
Mes amis, nous vivons à une époque extraordinaire. La puissance de la technologie et de la mondialisation se conjuguent pour refaire le monde. Ces deux forces créent des possibilités que nos parents n’auraient même pas imaginées. Et la génération qui arrive à l’âge adulte en ce moment dispose des outils et du potentiel nécessaires pour résoudre les plus gros et les plus difficiles problèmes du monde : changement climatique, une croissance qui profite à tous, des sociétés véritablement équitables où les perspectives ne sont limitées ni par le sexe, ni par la race, ni par les croyances.
Tout cela est possible si nous façonnons les grandes forces du changement de manière à ce qu’elles fassent progresser les gens. C’est le rôle d’un leadership progressiste à un moment comme celui-ci. Les dirigeants qui pensent pouvoir esquiver ces changements ou remonter dans le temps ont tort. Il nous revient de saisir ces changements et de les mettre au service des gens.
Le commerce en est un exemple. Nous savons que le commerce peut créer de bons emplois, le genre d’emplois qui soutiennent une classe moyenne solide et en croissance, qui offrent la possibilité de gravir l’échelle à ceux qui travaillent fort. C’est pourquoi nous avons travaillé si fort, pour veiller à ce que l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne soit un accord vraiment progressiste. Nous en sommes fiers et vous devriez l’être aussi. C’est un accord qui multipliera les possibilités et créera davantage de bons emplois de part et d’autre de l’Atlantique, pas seulement pour les grandes entreprises, mais aussi pour les petites entreprises, qui auront accès à davantage de marchés, pour les agriculteurs dont les excellents produits seront dégustés autant à Turin qu’à Toronto. Il en résultera une croissance dont les retombées avantageront tous nos citoyens, pas seulement les plus riches.
Les dispositions de l’AECG sur la protection des travailleurs, l’investissement responsable, la protection des aliments et des consommateurs, la gestion des ressources naturelles et l’intendance environnementale sont sans précédent. C’est un accord qui devrait servir de guide aux futurs accords commerciaux ambitieux et qui n’aurait pas été possible sans le soutien de dirigeants qui partagent notre point de vue, comme le premier ministre Gentiloni.
À vous tous ici aujourd’hui qui avez aidé à obtenir cet accord marquant, merci d’avoir contribué à la réalisation de l’AECG. C’est l’un des meilleurs accords commerciaux jamais négociés, c’est un accord qui servira la population de l’Italie et la population du Canada pendant de nombreuses années.
Mais nous le savons tous, il faut plus qu’un bon accord commercial pour dissiper les craintes des gens et leur offrir l’espoir d’un avenir meilleur, plus prospère. Au Canada, nous avons aussi inscrit en tête de liste l’augmentation du fardeau fiscal de ceux qui font partie du segment de 1 p. 100 de la population qui est la plus riche, afin de pouvoir alléger celui de la classe moyenne. Nous avons cessé d’envoyer des allocations familiales à des millionnaires pour qu’un plus grand nombre de familles canadiennes, neuf sur dix, puissent recevoir un peu plus pour faire face aux dépenses élevées nécessaires pour élever des enfants. Pour aider un plus grand nombre de jeunes Canadiens à réaliser leurs rêves, nous avons accru l’aide financière offerte aux étudiants, de façon à ce que les études postsecondaires soient plus abordables. Afin d’aider les travailleurs sans emploi ou sous-employés, nous investissons de façon à ce que chaque Canadien puisse suivre la formation nécessaire pour trouver et garder un bon emploi, bien rémunéré.
Ce ne sont que quelques exemples de la manière dont notre gouvernement réagit aux inquiétudes qu’il entend. Nous veillons aussi à ce que les choix que nous faisons concordent bien avec les valeurs qui ont toujours fait du Canada un pays fort et prospère.
Je vous ai parlé de ce que nous avons pu faire en l’espace de 19 mois, depuis notre arrivée, mais il vaut la peine de signaler que la toute première promesse électorale que nous avons tenue – techniquement avant même l’assermentation de notre gouvernement – a été de former un Cabinet paritaire. Il y a eu à l’époque beaucoup de grogne au Canada, de la part d’hommes qui s’en sont donné à cœur joie pour dire que les nominations au Cabinet devaient être fondées sur le mérite et non pas sur le sexe. Naturellement, il a été vite clair que ces nominations avaient été faites sur la base du mérite. Les femmes que nous avons choisies pour servir au Cabinet étaient tout à fait qualifiées, au moins autant que les hommes que nous avons choisis. Et c’est ce qu’elles prouvent depuis. Après tout, c’est une femme, l’ex-ministre du Commerce international, maintenant ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, qui a aidé à finaliser l’AECG.
Mais je ne veux pas vous quitter en vous donnant l’impression qu’il n’y a plus rien à faire. Lors de l’élection qui a donné le pouvoir à notre gouvernement, les Canadiens ont élu plus de femmes au Parlement que jamais auparavant, 88 en tout. Et grâce aux élections partielles, ce nombre est passé depuis à 92. Mais c’est encore à peine plus du quart des sièges de la Chambre des communes. Les femmes et les filles forment plus de la moitié de la population, mais seulement le quart de nos législateurs … Pour moi, ce n’est pas acceptable. Pas comme dirigeant politique, pas comme père et certainement pas comme féministe.
Et oui, il faut le répéter : je suis féministe. Et j’espère, comme tant d’entre vous, qu’au cours des prochaines années, il y aura un miroir de moins dans la Salla delle Donne.
Parce que c’est ainsi qu’on progresse, une personne à la fois, un changement à la fois. Je crois que nous avons la responsabilité de faire comprendre aux jeunes femmes et aux jeunes filles, que leur avenir est sans limites. Mais ce n’est que la moitié de l’équation. Nous avons aussi besoin de le faire comprendre à nos fils, ce que Sophie me rappelle régulièrement. Nous devons tout autant montrer à nos fils qu’il faut se concentrer sur l’égalité des chances, l’égalité des résultats. Vous voyez, j’ai deux fils et une fille, ce qui signifie que nous ne faisons pas qu’élever une féministe chez nous; nous en élevons trois.
Dans nos vies professionnelles en politique et comme dirigeants, nous devons faire attention de faire tendre nos efforts vers une plus grande égalité. Nous devons amplifier la voix des femmes et leur attribuer tout le mérite chaque fois qu’elles présentent une bonne idée. Nous devons cesser d’interrompre et commencer à écouter. Et nous devons veiller à ce que les femmes à qui on offre de s’asseoir en périphérie de la table s’assoient à la table, y compris dans les conseils d’administration.
L’automne dernier notre gouvernement a présenté un projet de loi qui obligerait les entreprises cotées en bourse à divulguer leurs actionnaires, le nombre de femmes siégeant sur leur conseil d'administration et occupant des postes de haute direction parce que comme pays nous devrions savoir où nous en sommes et comment nous pouvons nous améliorer. Et les pdg avec qui j’ai parlé comprennent pourquoi. Ils savent qu’une plus grande diversité au sein de leur conseil d'administration mène à la prise de meilleures décisions et à de plus grands profits. Et cela n’est pas seulement vrai pour les grandes entreprises. En affaires lorsque les femmes réussissent, lorsque leur sens de l’entrepreneuriat est encouragé, nous en bénéficions tous.
Vous savez, le Canada est un pays qui est fort non pas en dépit de nos différences, mais plutôt à cause d’elles. Les Canadiens ont répondu en ouvrant leurs bras et leurs cœurs face à la crise des réfugiés syriens. Au cours de la dernière année et demie, nous avons accueilli plus de 40 000 réfugiés syriens. Mais vous, qui êtes aux premières lignes de cette crise, avez répondu à l’appel en ouvrant vos maisons, vos écoles et votre esprit à ceux qui fuyaient la violence et la persécution. Pour cela, la population du Canada remercie celle de l’Italie; nous vous remercions du leadership dont vous avez fait preuve durant cette crise d’une si grande ampleur.
Au Canada, nous ne ménageons aucun effort pour prôner la diversité sous toutes ses formes. Pour cela, il nous faut notamment faire en sorte que notre pays, notre gouvernement, nos entreprises et nos écoles soient des endroits sûrs et accueillants pour nos sœurs et nos frères de la communauté LGBT. Et je tiens à vous féliciter de faire de même. C’est à peu près à pareille date l’an dernier que votre gouvernement a entrepris la démarche visant à reconnaître officiellement les unions civiles entre personnes de même sexe. Et j’espère que vous continuerez à travailler fort en vue d’appuyer et d’élargir les droits de la communauté LGBT. Parce que je vous garantis…
Je peux vous garantir que défendre les droits d’un citoyen d’aimer qui bon lui semble est une lutte qui en vaut la peine.
J’aimerais conclure aujourd’hui en citant un passage de Sa Sainteté le pape François, que j’ai eu le privilège extraordinaire de rencontrer hier. Dans son encyclique papale de 2015 intitulée Laudato Si, Sa Sainteté a déclaré : Il faut reprendre conscience que nous avons besoin les uns des autres, que nous avons une responsabilité vis-à-vis des autres et du monde, que cela vaut la peine d’être bons et honnêtes.
En tant que pays, le Canada et l’Italie ont besoin l’un de l’autre. Nous comprenons et nous assumons nos responsabilités communes. Et ensemble, nous continuerons de faire des progrès dans un monde de changements, ensemble comme des amis bons et respectables, pour notre bien mutuel et celui du monde.
Grazie. Merci.