Transcription - Le premier ministre Trudeau participe à une discussion informelle au Forum des affaires Canada-Inde
Le premier ministre Trudeau participe à une discussion informelle au Forum des affaires Canada-Inde
CHANDA KOCHHAR : Le très honorable Justin Trudeau, premier ministre du Canada. Je vous souhaite la plus cordiale des bienvenues, encore une fois, et bienvenue en Inde.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Merci.
CHANDA KOCHHAR : Vous savez, vous faites un long voyage ici en Inde, et tout le monde a bien hâte d’en apprendre plus au sujet de cette visite. Il y a beaucoup de choses en commun entre nos deux pays parce que, vous savez, nous sommes de grandes démocraties, nous sommes des sociétés multiculturelles et, bien sûr, le Canada accueille beaucoup de gens d’origines indiennes. Mais, au-delà de tout cela, il y a les affaires, il y a des liens commerciaux et ainsi de suite, mais je pense que nous devrions tout d’abord dire à l’auditoire pourquoi nous sommes en retard ici aujourd’hui.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Je regarde cet auditoire formé de chefs d’entreprise qui compte évidemment une majorité d’hommes, et j’aimerais souligner que j’ai passé la dernière heure et demie, alors que cela devait durer une heure, à parler avec d’extraordinaires chefs d’entreprise qui se trouvaient à être des femmes, à écouter leurs témoignages et à entendre les merveilleuses idées qu’elles avaient à proposer. Nous avons parlé de tout, que ce soit d’une journée « amenez votre belle-mère au travail » ou… non, c’est un moyen de susciter plus de respect à l’égard des belles-filles en milieu de travail, puis à la maison, lorsqu’elles reviennent du travail. Nous avons aussi parlé des disparités entre les rêves et d’une vaste gamme d’enjeux. Cela a été un moment extrêmement important afin de reconnaître qu’il y a beaucoup de travail à faire en matière d’égalité et de parité entre les sexes, et en ce qui a trait aux possibilités qui s’offrent aux femmes en affaires.
Le Canada, comme vous le savez, a beaucoup fait au chapitre de la parité des sexes dans mon Cabinet et nous mettons de l’avant de nombreuses initiatives en vue de soutenir les femmes en affaires, mais nous reconnaissons également que l’écart salarial entre les hommes et les femmes au Canada est en fait plus grand que dans beaucoup d’autres pays, y compris les États-Unis. Par conséquent, nous avons beaucoup de travail à faire et nous en sommes très conscients.
Dans le même ordre d’idées, l’Inde, où, je crois, seulement 26 ou 27 p. 100 des femmes sont sur le marché du travail ou participent à la main-d’œuvre, est l’un des derniers pays au monde à cet égard, et c’est un enjeu sur lequel il y a beaucoup de travail à faire. Alors, j’étais très heureux de vraiment y réfléchir. Et j’en suis reparti avec une recommandation très concrète : les chefs d’entreprise, dans l’ensemble du spectre, ici, en Inde et partout dans le monde, devraient prendre le temps d’écouter les difficultés et les obstacles auxquels se heurtent les femmes qui réussissent au sein de leur organisation afin d’apprendre comment autonomiser plus efficacement un plus grand nombre de femmes. Parce que faire en sorte que les femmes réussissent mieux au sein de nos entreprises n’est pas seulement quelque chose de gentil ou de bon à faire; c’est aussi une décision judicieuse. Cela mène à une plus grande réussite économique et à de plus vastes répercussions non seulement sur votre main-d’œuvre et votre entreprise, mais également sur la communauté que vous servez.
Alors, voilà pourquoi je suis en retard. C’est une très bonne raison. Mais je suis maintenant très heureux d’être ici avec vous.
CHANDA KOCHHAR : Oui, et bien sûr, ce que j’ai dit à nos femmes peut guider leurs voix. Une autre raison pour laquelle nous sommes en retard est que nous étions sensés parler pendant seulement une heure, mais qu’un homme nous a écoutées patiemment pendant plus d’une heure et demie. Alors (rires)… alors vous avez passé la matinée à rencontrer également beaucoup de chefs d’entreprise et ils ont dû vous dire que même notre premier ministre, Narendra Modi, affirme que l’Inde entreprend des réformes, qu’elle est en transformation et qu’il y a beaucoup d’occasions d’affaires ici. Par conséquent, quels sont vos commentaires au sujet de vos rencontres avec ces chefs d’entreprise?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Eh bien, tout d’abord, cela a été une matinée très stimulante passée à rencontrer, comme vous l’avez dit, de nombreux chefs d’entreprise et à parler des formidables liens qui unissent le Canada et l’Inde. Qu’il s’agisse de ressources naturelles, du secteur technologique dans les TI, de créativité, de biotechnologie ou de produits pharmaceutiques, il y a énormément de compatibilités et de complémentarités entre l’Inde et le Canada. Tant et si bien qu’au terme des rencontres tenues ce matin et de quelques autres rencontres auxquelles j’ai participé, nous sommes en mesure d’annoncer aujourd’hui la création de plus de 5 000 nouveaux emplois au Canada ainsi que des investissements de plus d’un milliard de dollars au Canada. Bien sûr, c’est… oui…
Mais bien entendu, d’un autre côté, nous avons aussi énormément parlé des entreprises canadiennes qui investissent en Inde. Dans des partenariats établis ici, dans nos caisses de retraite… Nous avons parlé d’investisseurs qui sont extrêmement actifs dans tous les merveilleux projets qui se déroulent ici, en Inde. Alors, cela a véritablement été une matinée profitable pour tous, une journée profitable pour nous tous, et je suis emballé par les possibilités qui découlent de l’amitié Canada-Inde qui, comme vous l’avez dit, comme toute amitié entre deux pays, va bien au-delà de la politique, même si tout va très bien sur le plan de la politique. Il y a également les liens entre les populations, les liens culturels, économiques et commerciaux; il y a tellement de façons pour nous tous de nous engager que je passe une semaine ici et que je pourrais en passer trois sans avoir le temps d’aborder suffisamment tout ce qui se passe.
CHANDA KOCHHAR : Oui, comme vous le dites, les occasions d’affaires peuvent être immenses parce que, pour mettre les choses en perspective encore une fois, je pense que l’Inde fait aussi l’objet d’énormes réformes structurelles, qu’il s’agisse de l’officialisation de l’économie, de l’accroissement de la transparence, du code régissant les faillites, de la TPS et ainsi de suite. Ce sont de vastes réformes structurelles qui s’appuient sur de nombreux changements touchant le système financier en soi, en ce qui a trait à l’élargissement des marchés d’obligations, etc. Elles s’appuient aussi sur d’immenses possibilités liées au fait que l’Inde est un pays jeune, alors il existe des possibilités découlant de la réalité démographique et il y a toutes les dépenses en infrastructure qui sont faites au pays, notamment une vaste gamme de logements abordables et ainsi de suite. Ensuite, le gouvernement manifeste la volonté de simplifier les affaires. Alors, cela représente des occasions pour les entreprises, et également d’énormes occasions pour les grands fonds canadiens existants parce qu’ils peuvent choisir de participer à de nouveaux projets ou à des projets en cours de mise en œuvre, ou qui sont terminés et offrent en quelque sorte un retour annuel.
Le commerce dont nous parlons entre nos deux pays, qui est peut-être de 8 milliards de dollars plus 2 milliards paraît, d’une certaine façon, insignifiant lorsqu’on pense aux échanges commerciaux de près de 2 milliards de dollars par jour entre les États‑Unis et le Canada dont vous parliez. Par conséquent, je crois que si les deux pays s’unissent et se concentrent, nous pouvons en faire bien davantage.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Eh bien, vous parlez notamment de relations d’entreprise à entreprise ou de gouvernement à gouvernement. En ce qui me concerne, j’aime penser à la relation entre les populations. Des entrepreneurs qui travaillent ensemble, des employeurs et employés qui trouvent des façons plus efficaces de collaborer, et il y a aussi les liens entre les étudiants. Le fait que nous comptons environ 125 000 étudiants indiens qui viennent au Canada chaque année. Il s’agit de la deuxième source d’étudiants étrangers dans le monde pour le Canada, et elle est rapidement en voie de devenir notre source la plus importante. On peut espérer que plus tard cette année, l’Inde sera au premier rang. Et cela veut dire qu’il existe d’immenses possibilités de générer des résultats dynamiques au Canada et en Inde.
Et, vous savez, je pense qu’au-delà de tous les liens commerciaux et entre les entreprises, si nous nous concentrons sur les liens et les amitiés entre les gens, sur les relations familiales, sur les jeunes qui souhaitent découvrir le monde et qui veulent s’épanouir dans un pays comme le Canada, où nous offrons des programmes d’études formidables, ils ont d’immenses possibilités de rapporter au pays une part de ce savoir-faire et, par la même occasion, des investissements canadiens. Ce sont les synergies de ce genre qui m’emballent le plus. Alors, à mes yeux, aussi important que soit le conseil des affaires, l’amitié Canada-Inde repose toujours et avant tout sur les gens.
CHANDA KOCHHAR : Oui, en effet. Je pense que vous nous l’avez également démontré durant ces quelques premiers jours de votre visite. Vous avez bien sûr visité l’Inde, comme vous l’avez dit, lorsque vous aviez 10 ans, en compagnie de votre père. Vous êtes maintenant ici avec vos charmants enfants et votre épouse et, bien sûr, durant ces quelques jours vous avez visité un lieu d’importance historique, comme l’ashram de Sabarmati ou une attraction touristique comme le Taj Mahal ou un lien d’intérêt religieux comme le temple Akshardham et aussi, bien entendu, le (inaudible) aussi, alors qui de mieux placé pour parler des relations entre les populations. Mais, vous savez, je dirais que nous expérimentons cela même en faisant des affaires, comme vous l’avez dit avec raison, parce que tout repose sur les liens entre les employés. Nous, en tant que banque, avons lancé ce que nous appelons le programme connexion étudiants pour permettre aux étudiants qui partent d’ici pour aller fréquenter des collèges au Canada de placer leur dépôt à terme ici et de tout faire en ligne de façon à ce que lorsqu’ils déménagent là-bas, leur argent soit transféré, versé à leur collège et leur vie devient beaucoup plus simple.
Alors, est-ce que votre famille aime son séjour en Inde, et comment s’intègrent-ils à la culture?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Eh bien, comme vous l’avez souligné, lorsque j’étais enfant, j’ai eu la chance incroyable d’être amené ici par mon père. J’ai passé une semaine complète ici pendant qu’il travaillait à (inaudible) et participait à des rencontres de chefs de gouvernements, ce qui fait que lorsque je suis allé au Taj Mahal et à Fatehpur Sikri, j’étais seul avec un garde du corps. Voilà pourquoi, cette fois-ci, il était extrêmement important pour moi d’être en mesure d’amener mes enfants au Taj Mahal et de le voir à travers leur regard. Mais, plus que cela, d’être en mesure de leur faire voir ce pays extraordinaire où l’avenir se crée chaque jour. On peut voir le potentiel, l’activité qui se déroule et savoir que dans les années qui viennent, la possibilité de partager avec mes enfants et de comprendre moi-même l’énorme évolution qui est en branle ici est très, très enthousiasmante.
Ainsi que le genre de leadership éclairé dont les gens comme vous êtes les fers de lance et, je voulais le souligner plus tôt lorsque je parlais de la parité entre les sexes, vous lancez une initiative vraiment extraordinaire portant sur un engagement en matière d’égalité des sexes que vous souhaitez faire adopter par les entreprises et qui concerne l’embauche et l’autonomisation d’un plus grand nombre de femmes. Pouvez-vous nous dire quelques mots à ce sujet?
CHANDA KOCHHAR : Oui. Nous avons discuté, durant la table ronde qui a précédé cette activité, de la possibilité de voir les entreprises s’engager à accroître la participation des femmes à l’ensemble de l’activité économique. Parce que, comme le premier ministre l’a dit, cela n’est pas simplement une approche gentille à adopter; en fait, il s’agit maintenant d’un impératif économique. Alors, nous avons beaucoup parlé de cela. Nous nous sommes demandé si nous pouvions encourager les filles à rêver. Si nous pouvions éduquer davantage les filles parce que, vous savez, lorsqu’on éduque un homme, on n’éduque en fait qu’une seule personne, alors que lorsqu’on éduque une femme, on a tendance à éduquer plus de membres de la famille. Et comment pouvons-nous autonomiser les femmes? En créant un environnement qui leur permet davantage de s’épanouir.
Alors, vous savez, tout le monde autour de cette table était si inspiré par chacun des témoignages que nous avons décidé de créer un engagement pour affirmer que nous allions encourager de plus en plus la participation des femmes dans tous nos domaines d’activité.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : C’est tout simplement merveilleux. Oui.
Et j’encourage chacun de vous à examiner la possibilité de signer cet engagement. Ce serait formidable de voir plus d’entreprises le faire.
Vous avez parlé de mes enfants et de notre voyage. L’une des choses que je voulais vraiment partager avec eux est l’extraordinaire diversité de l’Inde. Le fait de pouvoir se rendre à un splendide mandir, de pouvoir aller au Temple doré demain, puis d’aller dans une mosquée plus tard durant la semaine, de souligner la diversité et le pluralisme extraordinaires de l’Inde. Qui comporte ses difficultés, mais le fait de comprendre cette diversité de points de vue et d’origines est une incroyable source de force. C’est une source de résilience pour une organisation, une communauté, un pays. Être capable d’entendre différents points de vue, d’apprendre d’eux, d’en tirer des conclusions et de ne pas se sentir interpellé… en fait oui, se sentir interpellé, mais pas menacé par eux est, je crois, un signe de maturité dans une communauté. Un pays comme l’Inde, vous savez, peut et doit montrer la voie à suivre en matière de respect et de diversité, et je pense que le fait de souligner cette incroyable diversité pour que mes enfants comprennent que ce n’est pas seulement le Canada qui est diversifié, mais que d’autres pays dans le monde travaillent fort à cet égard, est une bonne chose.
CHANDA KOCHHAR : Merci.
C’est parce que nous, en tant que pays, tirons en fait une grande fierté de notre riche patrimoine et du genre de diversité qui est la nôtre. Alors, merci de le reconnaître et de l’apprécier.
Pour continuer un peu, encore une fois, revenons au commerce. Vous savez, vous avez exprimé de nombreux points de vue intéressants relativement au commerce international et à l’établissement d’un ordre mondial en matière de commerce. Aimeriez‑vous nous parler de ce que vous avez fait avec d’autres pays et de votre façon de percevoir ce (inaudible).
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Eh bien, nous avons entendu un discours se répandre dans le monde en matière de politiques et de sociétés, particulièrement dans le monde occidental, selon lequel les gens s’inquiètent face aux répercussions de la mondialisation sur les citoyens ordinaires, sur les travailleurs. On s’inquiète du fait que nos réussites n’ont peut-être pas contribué au bien-être des gens, des travailleurs et de leurs familles. Et à une époque où le monde, à bien des égards, se ferme et se détourne du commerce, le Canada est très fier d’avoir signé d’importants accords commerciaux. Nous venons de signer un accord de libre-échange avec l’Union européenne, qui représente un marché de 500 millions de personnes et constitue la deuxième économie en importance dans le monde, lorsqu’on la considère dans son ensemble. Nous travaillons encore à l’ALENA et je peux vous dire que cela se déroule bien et que nous sommes persuadés de pouvoir continuer de profiter d’un libre-échange avec les États-Unis et le Mexique. Et nous venons de signer le PTPGP, qui réunit un bloc de 11 pays du Pacifique représentant également une importante part de l’économie mondiale.
Nous savons que le commerce engendre la croissance, mais si nous sommes en mesure de garder l’appui de la population à l’égard des accords commerciaux au Canada, c’est parce que nous prenons des mesures très importantes pour veiller à ce que les avantages du commerce soient partagés avec les citoyens ordinaires. Pendant que nous continuons de plaider pour le commerce mondial, nous devons faire en sorte que les petites entreprises profitent d’un accès accru aux marchés internationaux, que les travailleurs se voient offrir des possibilités, que les peuples autochtones, les femmes et les communautés marginalisées puissent aussi profiter de ces accords commerciaux.
Des choses semblables se produisent en ce qui touche l’immigration. À une époque où le monde tend à se replier sur lui-même, à se fermer et à s’inquiéter au sujet de l’immigration, le Canada augmente son taux d’immigration et, bien honnêtement, la plainte que j’entends le plus souvent de la part des Canadiens, des entreprises canadiennes et de la population en général est que nous n’accueillons pas assez d’immigrants. Et c’est rare, dans le monde. Nous savons que nous pouvons le faire parce que nous avons créé une réussite et que nous continuerons de contribuer à cette réussite. Nous avons présenté une stratégie en matière de compétences mondiales selon laquelle une entreprise peut attirer les meilleurs talents des quatre coins du monde et leur obtenir un visa en moins de deux semaines. Parce que nous savons qu’en attirant un cadre de l’étranger, beaucoup de diplômés et de talents canadiens seront embauchés. Ainsi, comprendre que l’ouverture à l’immigration et aux talents internationaux constitue un avantage incroyablement positif sur la scène mondiale est une autre façon par laquelle nous voyons la mondialisation comme étant une véritable occasion.
Mais nous comprenons que dans le monde, les gens s’inquiètent du fait que tout est en train de changer. Que l’IA, l’automatisation et les chaînes d’approvisionnement mondiales menacent l’ordre établi des choses. Mais au lieu d’essayer de nous accrocher le plus longtemps possible à la façon dont les choses se déroulaient auparavant, le Canada choisit de faire le bond en avant avec confiance vers cette transition et de faire en sorte que plus de jeunes étudient dans les domaines des STIM. Que ce soit dans les universités, les collèges communautaires ou les écoles professionnelles, assurons-nous d’investir dans la recherche sur l’IA. À l’heure actuelle, le Canada est un chef de file dans la recherche sur l’AI d’un bout à l’autre du pays. Nous sommes des chefs de file en matière d’automatisation, de voitures autonomes, nous réalisons une quantité incroyable d’innovations technologiques parce que le Canada a décidé de faire partie de l’avenir, et non de s’y opposer. Et je constate une approche très semblable ici, en Inde, et c’est extrêmement emballant d’être en mesure d’établir le lien entre ce que font nos deux pays et d’augmenter l’influence que nous pouvons avoir en étant les chefs de file du monde entier.
CHANDA KOCHHAR : Oui, alors puisque vous parlez de la capacité d’établir un lien entre les deux pays, lorsque vous avez rencontré notre premier ministre, M. Modi, il a dit que le Canada et l’Inde sont faits l’un pour l’autre. J’ai aussi suivi des médias canadiens qui soulignent quatre à cinq industries spécifiques dans lesquelles l’Inde et le Canada peuvent coopérer. Par conséquent, dans le cadre de cette visite en Inde, y a-t-il deux ou trois résultats très précis que vous aimeriez atteindre?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Bien, je dirais… penser plus souvent au Canada en tant que destination pour l’investissement, qu’endroit où obtenir de l’investissement, penser à nos caisses de retraite, à nos grands partenaires d’investissement ici en Inde, mais, lorsque vous cherchez à prendre de l’expansion dans le marché mondial, la main-d’œuvre canadienne, la diversité canadienne, les possibilités canadiennes d’accéder aux marchés mondiaux par l’entremise de nos accords de libre-échange sont des avantages indéniables. Et je pense qu’en général, je voudrais que cette visite pousse les gens à penser au fait que nous travaillons si bien ensemble. Nous sommes les deux plus grandes démocraties du monde. L’une sur le plan de la population, l’autre sur le plan de sa superficie.
Nous devrions accomplir de plus grandes choses ensemble. Et cette visite a pour objectif véritable de mettre en valeur nos liens étroits et ces incroyables possibilités. Ce n’est pas, vous savez, un voyage… une occasion de serrer des mains et de prendre des photos. En tant que délégation canadienne, nous prenons notre temps. Pour ma part, je vais partout, mais nous avons un important groupe de ministre dans différentes régions du pays pour vraiment faire en sorte que les gens se rendent compte qu’il existe un immense potentiel encore inexploité dans la relation Canada‑Inde.
CHANDA KOCHHAR : Absolument. Nous avons une autre chose en commun en ce que vous êtes le pays du G7 qui connaît la croissance la plus rapide et que nous sommes la grande économie dont la croissance est la plus rapide au monde.
Par conséquent, je pense que si nous pouvons unir nos forces, les liens d’affaires peuvent devenir beaucoup plus étroits que ce qu’ils sont en ce moment. Et, comme je l’ai dit même en Inde, le fait est que la démographie en soi est un énorme dividende et offre un immense marché aux entreprises canadiennes. Et ce n’est pas simplement le fait que l’Inde est un pays jeune, le fait est que l’Inde restera jeune durant de nombreuses années, pendant que le reste du monde vieillira. Et la deuxième chose est que…
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : C’est une bonne astuce.
CHANDA KOCHHAR : Oui.
La deuxième chose est que l’investissement dans l’infrastructure que nous devons faire en Inde, dans les années qui viennent, offre une immense occasion. Et, comme je l’ai dit, aujourd’hui nous trouvons des possibilités même dans les projets déjà terminés et auxquels contribuent beaucoup de fonds canadiens, parce qu’une fois les projets terminés, il y a une demande constante pour les produits qui en découlent. Ensuite, il y a tous les nouveaux investissements qui seront réalisés. En somme, il y a vraiment d’immenses possibilités.
Y a-t-il des choses en particulier que vous aimeriez dire au sujet de n’importe quelle autre industrie?
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Oh, lorsqu’il est question du Canada, les gens pensent souvent aux ressources naturelles et, en effet, qu’il s’agisse de fibre de bois, de minéraux, de sources d’énergie, il ne fait aucun doute que le Canada offre et continuera d’offrir de formidables occasions en ce qui a trait aux ressources naturelles de grande qualité, exploitées de façon responsable, durable, sécuritaire et de plus en plus innovatrice. Cela reste vrai. L’Inde, avec la croissance de son économie, aura toujours une énorme demande pour les ressources naturelles exploitées de manière fiable. Mais je pense aussi que notre plus grande ressource est notre population. De même, bien entendu, que le 1,3 million de nos gens, ce qui représente une proportion beaucoup plus grande pour le Canada que pour l’Inde. Nous sommes seulement 36 millions d’habitants. La proportion de gens d’Asie du Sud, et plus spécifiquement d’Indo-Canadiens, est l’une de nos grandes forces. Nous sommes innovateurs en ce qui a trait à nos grappes de haute technologie, comme Kitchener-Waterloo, dans des régions du pays où nous montrons que les investissements dans l’éducation, la créativité, l’économie du savoir sont la voie de l’avenir.
Nous venons d’annoncer une stratégie de supergrappes qui offrira de nouvelles possibilités aux entreprises. J’ai souvent entendu de la part d’entreprises indiennes ou d’investisseurs étrangers à leur arrivée nous dire qu’ils sont prêts à venir, mais qu’ils n’ont aucun réseau auquel se brancher. Ils cherchent des occasions, mais ne savent pas toujours où trouver les meilleures. Eh bien, cette initiative des supergrappes vous permettra d’adhérer à un réseau d’universitaires et de centres de recherche, vous savez, de grandes institutions bien établies qui agissent en collaboration; des petites entreprises et des entreprises en démarrage, toutes branchées autour d’un secteur thématique qui engendrera des effets multiplicateurs sur l’innovation et la croissance économique. En somme, nous faisons beaucoup de choses emballantes au Canada, et j’espère vraiment que de plus en plus d’investisseurs, d’entreprises et d’employeurs indiens se pencheront sur les possibilités offertes par le Canada.
CHANDA KOCHHAR : Oui, merci. Je pense que je peux parler de notre exemple, du fait que nous avons établi notre banque là-bas en 2003, et qu’il s’agit d’une banque offrant une gamme complète de services. Et, encore une fois, la facilité de faire des affaires là-bas nous a aidés à croître. Et bien sûr, nous avons investi un capital important là‑bas; il s’agit d’une entreprise de 7 milliards de dollars et je pense que nous jouons un rôle dans les deux sens : pour les entreprises indiennes qui s’établissent au Canada, et pour les entreprises canadiennes qui souhaitent s’établir en Inde. Et le flux des échanges commerciaux entre l’Inde et le Canada, c’est le volet à « affaires. »
Pour ce qui est du volet « liens entre les populations », comme je le disais plus tôt, nous facilitons la vie des étudiants qui immigrent au Canada, nous sommes actifs auprès de la diaspora, qui est très présente au Canada et, bien entendu, nous participons également un peu en ce qui a trait aux personnes handicapées, par le biais de l’Institut Helen Keller, et ainsi de suite.
Alors, comme vous l’avez dit, tout comme les entreprises ou les sociétés indiennes vont là-bas, plus de 400 entreprises canadiennes sont déjà présentes en Inde, et 1 000 autres cherchent à s’établir ici. Et je pense que l’Inde fait tout son possible afin de faciliter les affaires pour que les sociétés canadiennes soient elles aussi en mesure de faire croître leur entreprise ici, en Inde.
Monsieur le Premier Ministre, je sais que le temps file, mais je voudrais vous dire que c’est un vrai plaisir d’interagir avec vous, parce que l’Inde vous regarde depuis les derniers jours et je pense que les gens ont été plutôt charmés par la façon dont vous essayez de vous mêler à nous. Non seulement en ce qui a trait aux affaires, mais aussi à la culture de l’Inde, vous et votre famille. Vous êtes un modèle à cet égard et nous vous avons vu participer aux activités de la communauté indienne au Canada également. Vous savez, la marche du Jour de l’Indépendance et le Bhangra.
C’est vraiment rare de voir un chef d’État être si concentré sur les affaires et, en même temps, prendre tant de temps pour aborder des sujets comme l’autonomisation des femmes et pour vraiment créer des liens entre les populations et les cultures.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Eh bien, j’ai la chance d’avoir été un enseignant et, pour moi, découvrir le monde est une question de curiosité, et je suis curieux au sujet de ce qui mène à la réussite des entreprises. Je suis curieux au sujet de ce qui mène à la réussite personnelle. Je suis curieux de la façon dont les gens envisagent l’avenir, voient le présent, et des moyens de travailler ensemble pour y arriver. Alors je pose des questions et, croyez-moi, il y a beaucoup de questions à poser ici, en Inde. Et au cours des derniers jours et des prochains jours, j’ai hâte d’apprendre les différents moyens qui permettraient au Canada d’être un meilleur partenaire pour l’Inde, et à l’Inde d’être un meilleur partenaire pour le Canada, et qui nous permettraient de travailler ensemble, de grandir ensemble, d’apprendre l’un de l’autre et de créer un monde meilleur, plus sûr et plus prospère pour tous.
Je pense qu’il y a une formidable possibilité de faire croître cette relation entre le Canada et l’Inde. Et c’est un extraordinaire plaisir pour moi de pouvoir être ici et de partager cela avec ma famille également.
CHANDA KOCHHAR : Merci.
LE TRÈS HON. JUSTIN TRUDEAU : Merci beaucoup tout le monde. Merci.