Transcription - Le PM Trudeau anime une discussion plénière sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
Le PM Trudeau anime une discussion plénière sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU (premier ministre du Canada) : Je crois que l’une des premières questions à poser, après avoir entendu ces panélistes nous raconter leur parcours extraordinaire et leur force extraordinaire, ces femmes incroyables que tout le monde s’arrache, c’est : pourquoi avez-vous pensé que votre temps serait bien investi dans le Conseil consultatif du G7? Quels seraient les indicateurs de la réussite et comment se porte le Conseil, selon vous? Quels sont les défis que vous entrevoyez et quelles retombées croyez-vous que nous pourrons obtenir? Commençons par Phumzile, tout au bout.
PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA (directrice générale d’ONU-Femmes) : Merci beaucoup, Monsieur le Premier Ministre, et tous ceux qui sont ici aujourd’hui, d’avoir rendu cet événement possible. Pour moi, c’est comme un rêve devenu réalité d’avoir la chance d’influencer le discours au sein du G7, qui réunit les hommes, et la femme, les plus puissants du monde entier qui changent la vie de tant de gens dans le monde. Si nous pouvons modifier leur discours pour que ce qui en ressort améliore les choses aujourd’hui par rapport à hier, et demain par rapport à aujourd’hui, et ainsi de suite, ce serait un moment charnière de notre histoire, non pas celle des citoyens du G7, mais celle des gens – et en particulier des femmes – du monde entier. C’est une occasion unique que je serais bête de ne pas saisir.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Merci, Phumzile. Leymah, que pensez-vous du Conseil?
LEYMAH GBOWEE (lauréate du prix Nobel de la paix de 2011) : (Inaudible)…
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Elle porte un micro.
LEYMAH GBOWEE : Je vais être très franche : dans ma langue natale, on dit que j’apporte beaucoup. On ne peut pas cacher son honnêteté dans sa petite poche arrière, ce qui veut dire qu’il faut être honnête avec les gens avec qui on doit interagir pendant un moment. Je vous ai rencontré il y a quelques mois. Nous étions dans cette salle. Vous n’étiez pas obligé de me prendre au sérieux. Nous avons parlé des militantes de la base et du besoin de diversifier les fonds qui leur sont directement versés. Je vous ai dit de l’appeler le Fonds de Justin et vous m’avez dit : « non, Leymah, nous allons l’appeler le Fonds Canada... peut-être le Fonds Canada 150 ». Je suis sortie de cette rencontre et j’ai dit à Liz Bernstein de la Nobel Women’s Initiative et à ma collègue Sarah que nous sortions d’une réunion pleine de substance. Parce que, la plupart du temps, quand on rencontre des politiciens, on quitte la réunion et... Je suis maintenant capable de discerner les réunions vides de substance – ou remplies de foutaise, si vous me permettez l’expression –, c’est-à-dire quand les gens vous regardent sans dire quoi que ce soit, vraiment. Ils emploient les bons mots, mais en réalité ils se foutent complètement de vous.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Je pense que certaines personnes ici ont déjà vécu cela en réunion.
LEYMAH GBOWEE : Alors, quelques semaines plus tard, vous avez annoncé un investissement de 150 millions de dollars pour les militantes locales. Nous allons y arriver. Quand vous m’avez demandé de me joindre au Conseil, j’ai dit : « voilà quelqu’un qui n’a pas peur de tous les problèmes que je vais apporter ».
Mais comme Phumzile l’a dit, je ne viens même pas d’un pays du G7, vous n’étiez pas obligés de m’inviter, alors cela veut dire que vous respectez non seulement ma voix et mon travail, mais ceux de nombreuses activistes œuvrant sur le terrain. Parce que je pense que je représente ces femmes. Si je dois m’exprimer, cela doit être en m’appuyant sur le travail qu’elles font. Alors la première chose a été de vous faire confiance.
Et la deuxième chose, c’est ce que je pourrais apporter au Conseil que personne d’autre ne pourrait apporter, comme des foutaises.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Chris, à vous…
LGEN CHRISTINE WHITECROSS (commandante du Collège de défense de l'OTAN) : Je ne suis pas certaine de vouloir être la prochaine.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Vous avez une expérience en génie et, bien évidemment, une expérience militaire. Il n’y a pas de foutaises dans l’armée, ça on le sait. Dites-nous quelles sont vos attentes par rapport à ce conseil et comment, selon vous, cela fonctionnera.
LGEN CHRISTINE WHITECROSS : Personne ne veut jamais passer après Leymah. Je dirai juste deux choses, Monsieur le Premier Ministre. La première : j’ai été déployée à quelques reprises en tant que militaire dans des pays comme la Bosnie-Herzégovine et l’Afghanistan, où j’ai vu de nombreux effets, mais surtout l’effet des femmes et des filles sur les ressources et, inversement, des gens très talentueux qui n’avaient pas les ressources, les capacités ou les réseaux nécessaires pour faire ce qui devait être fait.
Ensuite, j’ai aussi eu la chance – certains diraient la malchance – de diriger l’Équipe d'intervention en cas d'inconduite sexuelle des Forces armées canadiennes. Certains diront naturellement : pourquoi vous? Et je leur répondrais : pourquoi pas? Je suis très passionnée et je crois que notre équipe était très dévouée et qu’elle voulait vraiment changer les choses.
Ce qui m’amène à répondre à votre question. Je crois que nous avons l’occasion de susciter le changement et que les membres du Conseil, ces hommes et femmes extraordinaires avec qui je suis honorée de travailler, ont quelque chose à offrir. Et, bien honnêtement, je veux le faire pour mes enfants, qui sont jeunes, motivés, talentueux et très tolérants, et nous avons l’occasion de changer les choses. Merci.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Melinda, je ne crois pas avoir rencontré beaucoup de femmes aussi occupées que vous. Chaque fois que nous nous rencontrons, nous sommes quelque part sur la planète, et vous avez toujours des tonnes de projets en cours. Pourquoi avez-vous cru important de coprésider le Conseil au lieu de simplement en être membre? Et quelle influence espérez-vous avoir sur le G7 par l’intermédiaire du Conseil?
MELINDA GATES (coprésidente, Conseil consultatif sur l’égalité des sexes du G7) : Eh bien, quand je regarde l’histoire du G7, ce que le groupe a réalisé et les causes qu’il a défendues, cela se résume à trois choses : l’économie, la sécurité et l’environnement. Ce sont les trois avenues que le G7 défend. Quand je pense à notre économie, je vois qu’elle s’est construite sur le dos des femmes. Quand je pense aux femmes sur le marché du travail, de nos jours, et que je me demande si nous y sommes arrivées, je me dis que nous n’y sommes pas encore. Nous y sommes presque, mais nous n’avons pas obtenu ce qui nous revient dans le cas des salaires ou des politiques de congés et nous ne sommes pas représentées de manière égale.
Quand je pense à la sécurité ainsi qu’à la paix et à la sécurité dans le monde, je me demande : qui apporte la paix et la sécurité? Souvent, il s’agit des femmes, si nous leur en donnons les moyens. Regardez seulement ce que Leymah a fait dans son pays. Regardez ce qu’elle a fait. Regardez ce que les femmes font.
Quand je pense à l’environnement et à notre climat, aux changements climatiques et aux personnes qui auront la plus grande influence, je pense souvent aux agricultrices. Dans le monde, la plupart des femmes sont des agricultrices.
C’est ainsi que, quand vous m’avez donné la chance de faire partie du G7, je me suis dit : quel meilleur moyen existe-t-il pour amener tous les enjeux liés aux femmes au G7? Pas seulement quelques enjeux, mais tous. Et je me réjouis beaucoup de la discussion enrichissante que nous avons eue plus tôt au Conseil et au repas et d’avoir entendu les idées des membres. Vous savez, cela ne fait que quelques années que ce conseil est formé. Le premier groupe de femmes s’est réuni lors de la présidence de la chancelière Merkel. C’est donc une chance que l’égalité des sexes soit un thème transversal nommé, non pas seulement dans le cadre de ce sommet-ci, mais dans les prochains aussi, d’après l’engagement que vous avez pris. Je le fais aussi parce que j’ai le privilège de voyager. Je me rends en Afrique plusieurs fois par année. Je vais en Asie du Sud-Est. Je vais retrouver les femmes des villages. Je m’assois sur la petite natte qu’elles sortent ou dans leur hutte de terre, et nous parlons des vrais problèmes qu’elles vivent. Si nous pouvons éliminer les obstacles qui se dressent devant ces femmes, qu’elles habitent dans un pays à revenu faible, moyen ou élevé, nous le ferons, en donnant une voix et des moyens aux femmes. Et, croyez-moi, quand elles ont une voix et des moyens et quand elles ont le pouvoir de décider, elles changent le monde. Voilà mon objectif.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Ah, bravo. Quand on pense au G7, on se dit qu’il réunit les plus grands pays industriels dans le monde. Il y a souvent un grand écart entre le Nord et le Sud et dans notre façon de voir les choses. Les mesures que nous devons prendre pour notre économie ne sont pas les mêmes que nous devons prendre pour changer le monde. Cela dit, je pense qu’il est important de prendre conscience que même dans nos propres économies, nous vivons d’immenses difficultés et d’immenses inégalités et que nous ne réussissons pas toujours à en tenir compte. Je suis vraiment très fier que, ces dernières années, les Canadiens aient affirmé que la réconciliation avec les Autochtones est essentielle au Canada si nous voulons que notre pays devienne celui que nous souhaitons tous. Je pense à la façon dont cela s’imbrique dans le programme du G7 et à nos propres exemples, et c’est l’une des raisons pour lesquelles je suis si fier que vous ayez accepté de faire partie de ce conseil, Roberta. Pour veiller à ce que les gens sachent que nous discutons des différentes identités et intersectionalités ainsi que des problèmes que les femmes autochtones dans le monde entier, mais aussi au Canada, sont plus nombreuses à vivre. Je vous dis donc merci de faire partie du Conseil. Qu’espérez-vous y accomplir?
ROBERTA JAMIESON (PDG d’Indspire) : Merci. Vous venez d’en faire un bon résumé, Monsieur le Premier Ministre. Quand vous...
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Je n’ai pas l’habitude d’animer, je suis désolé.
ROBERTA JAMIESON : Lorsque vous m’avez appelée... je veux dire, je pense que vous savez à quoi vous attendre quand vous invitez une Mohawk déterminée à siéger à un conseil. Alors...
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Je m’attendais en quelque sorte à la même chose quand j’ai invité Leymah à faire partie du Conseil.
ROBERTA JAMIESON : Monsieur le Premier Ministre, je me suis dit que, quand vous avez pris le combiné, vous saviez qui vous appeliez. Encore aujourd’hui, vous nous avez encouragées à parler haut et fort. Je dois dire que cela m’a emballée, parce que j’aurais eu du mal à faire le contraire. Vous êtes prêt à... pourquoi ai-je accepté? Parce que vous êtes prêt à vous servir de la présidence du G7 pour faire avancer des enjeux qui sont importants pour le monde entier. Vous n’avez pas peur de poser votre regard dans votre pays et à l’extérieur de celui-ci. Et, oui, nous sommes sur la voie de la réconciliation au Canada. Cela nous a pris 150 ans pour y arriver et, comme mon ami le sénateur Murray Sinclair le dit, nous ne réussirons pas du jour au lendemain. Il faudra y mettre beaucoup d’efforts, un investissement sérieux et soutenu que vous vous êtes déjà engagé à faire. Je pense que je suis plus optimiste aujourd’hui que jamais.
Parce que vous n’avez pas peur de faire une introspection et de prendre conscience que des femmes et des filles vivent dans des conditions du tiers monde dans un pays avancé comme le Canada. Si vous ne pouvez pas boire l’eau du robinet, si vous ne pouvez pas vivre dans votre maison, si vous ne pouvez pas aller à l’école, si vous n’avez rien à manger : ce sont là des problèmes au Canada qui, je crois, sont inconnus du reste du monde. Mais vous n’avez pas peur de les sortir au grand jour. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai accepté.
De plus, vous nous avez montré aujourd’hui que l’éducation est importante pour vous, et vous savez à quel point ce sujet me passionne. Pas seulement l’éducation des Canadiens, mais le savoir des Autochtones, ce qu’on a transmis au monde et ce qu’on peut encore lui transmettre concernant la responsabilité environnementale, la résolution de conflits et la médecine traditionnelle. Nous avons des solutions tout en étant des peuples marginalisés, des opprimés, des victimes. Nous avons des réponses et nous aimerions pouvoir les faire connaître. Alors, ce type d’éducation et l’éducation de notre population. Quand seulement quatre jeunes dans les réserves sur dix finissent leur secondaire tandis que, chez les Canadiens non autochtones, on parle d’un taux d’environ neuf sur dix, c’est problématique. Mais nous savons comment changer les choses. Par des investissements, oui. Mais aussi par l’éducation, qui valide notre identité autochtone. Ce pays a essayé de nous transformer en un peuple que nous n’étions pas, et maintenant nous sommes fiers de nous tenir debout et, avec votre soutien, de faire des pas en avant. C’est pourquoi j’ai accepté.
Et, bien entendu, pour ce qui est du G7, je pense que tous les enjeux étudiés au G7 ou à l’ONU touchent les femmes. Je pense...
…Alors pour moi, la réussite se résumerait à ce que cette approche axée sur l’égalité des sexes et l’importance de l’intersectionalité, dont vous êtes le chef de file, soit au coeur de tous les points au programme à partir de maintenant. C’est seulement le début d’une aventure emballante qui n’a pas de commune mesure.
Je vous remercie de votre courage et de votre leadership et j’ai hâte de vous présenter un rapport du tonnerre, en collaboration avec mes autres collègues.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Merci. Nous n’avons bien sûr que très peu de temps, en ce moment, et il y a tant de sujets à aborder. L’un des sujets qui revient sans cesse, cependant, est l’importance de l’éducation comme moyen de réussir autant au pays qu’ailleurs dans le monde. L’éducation et l’autonomisation des femmes et des filles, en particulier en tenant compte des différentes identités et intersectionalités. Nous pouvons toujours voir les réussites ou les avancées des femmes faisant partie, par exemple, du palmarès des dirigeants de Fortune 500, mais quand nous y regardons de plus près, nous voyons qu’il s’agit presque seulement de femmes blanches plus âgées. De nombreuses femmes sont exclues en raison de leurs identités multiples, et c’est de plus en plus difficile de nous assurer de les intégrer. Ou encore, c’est de plus en plus important de pouvoir les intégrer et c’est de plus en plus difficile parce que le monde évolue. J’aimerais donc qu’on se penche sur l’éducation, que ce soit dans le monde avancé ou le monde en développement, et sur les priorités de chacune d’entre vous.
Car l’une des mesures tangibles qui ressortira de ce G7 sera un travail de coopération au développement qui sera axé sur l’éducation. Je parle ici des réfugiés dans les camps qui obtiennent de l’aide humanitaire, mais qui ne reçoivent pas une éducation parce que certains pensent qu’ils habiteront dans ce camp pendant un an ou deux, alors que ce n’est pas le cas. Nous savons que, réalistement, ils pourraient être déplacés pendant une dizaine d’années de leur vie. On ne peut pas lésiner sur l’éducation. Je parle aussi des endroits où, en raison de la culture ou des traditions, les femmes sont exclues des parcours scolaires, ou d’autres endroits où les obstacles économiques sont si grands que les femmes ne font pas partie de la population qu’il faut éduquer en priorité. Cela m’amène à croire que nous pouvons creuser encore davantage le sujet de l’éducation. Qui aimerait commencer? Leymah, allez-y. Vous portez un micro, vous aussi, alors vous pouvez l’essayer.
LEYMAH GBOWEE : Je pense que vous essayez de me réduire au silence.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Ah, mais non. De toutes les intervenantes sur ce plateau, je pense que vous seriez la dernière à être réduite au silence.
Voilà, voilà.
LEYMAH GBOWEE : Merci. Nous savons tous que l’éducation, c’est très important. Je viens d’une famille de cinq filles et, dès le départ, mes parents trouvaient important que nous allions à l’école. Des années après avoir commencé mes études, à 17 ans, nous sommes arrivés au Ghana en tant que réfugiés. L’occasion s’est présentée parce que j’ai obtenu mon diplôme d’études secondaires la veille du début de la guerre civile. Nous sommes donc allés au Ghana, et j’ai été l’une des premières étudiantes à obtenir une bourse pour étudier en sciences infirmières. Ma mère était emballée. Pas moi. J’ai refusé cette offre.
Deux raisons. Ma mère vendait des légumes dans les camps, et ma soeur avait donné naissance à un enfant et on ne savait pas où était son mari. L’argent que ma mère gagnait en vendant ses légumes servait à faire vivre notre famille de dix personnes dans le camp. Ma soeur avait un bébé. J’ai commencé à vendre des beignets, et l’argent que je gagnais me permettait d’acheter du lait et des couches pour le bébé. Lorsqu’il est tombé malade, c’est grâce à l’argent des beignets que nous avons pu l’envoyer chez le médecin. Quand j’ai eu cette occasion, je me suis donc demandé qui allait bien pouvoir s’occuper de Josephine et du bébé. Alors, j’ai refusé.
Si nous décidons de discuter de l’éducation des filles, nous devons envisager le sujet d’une manière globale. Car les filles sont confrontées à de nombreux problèmes dans les camps de réfugiés, dans les communautés, que nous ne pouvons pas résoudre en vase clos. Tout doit être interconnecté.
Dans ma propre expérience dans le domaine de l’éducation, j’ai eu le cas d’une jeune femme qui est venue à moi pour me dire qu’elle ne voulait plus de ma bourse. Elle m’a dit qu’avant d’avoir cette bourse, elle était vendeuse. Que sa mère avait une maladie mentale. Les beignets qu’elle vendait chaque semaine – elle vendait du pain – lui permettaient de mettre de l’argent de côté pour que ses frères et sœurs aillent à l’école. Elle a reçu notre bourse. Elle devait maintenir une moyenne de 3 comme étudiante en sciences. Elle passait donc son temps à étudier. Elle ne pouvait plus vendre ses choses, alors elle revenait à la maison auprès d’une maman affamée et de frères et soeurs qui ne pouvaient plus fréquenter l’école. Quand nous repensons l’éducation, sous toutes ses formes, quand nous présentons nos idées au G7, faisons-le en adoptant une perspective globale. Nous ne pouvons plus concevoir le développement d’un point de vue unique. Et je pense que ma propre expérience, c’est ce qui m’amène toujours à dire oui, c’est important, mais vous ne pourrez jamais séparer Leymah de ses huit enfants et vous ne pourrez jamais faire oublier aux mères dans cette salle le bien-être de leur fille.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Phumzile, puis Melinda.
PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA : Merci d’aborder ce sujet très important, car l’éducation est peut-être ce qui se rapproche le plus de la solution magique. Quand on l’aborde en vase clos, il s’agit d’une solution, mais pas tout à fait d’une solution magique. Comme Leymah l’a dit, il faut donc qu’on traite ce sujet dans un contexte plus large.
Quand je pense aux personnes déplacées, aux réfugiés et ainsi de suite, l’une des choses qu’ils ont quand ils sont déplacés, ce sont des droits, grâce aux lois internationales qui accordent des droits aux gens. Ces droits peuvent leur être refusés ou peuvent être compromis, mais ils leur appartiennent.
La deuxième chose qui appartient aux gens même dans une situation difficile et qu’on ne peut pas leur enlever, c’est leur éducation. Quand quelqu’un vous regarde de haut, qu’il vous hait ou qu’il a une attitude raciste à votre égard, il ne pourra jamais renier le fait que vous avez une éducation. Et cela vaut pour nous tous. Peut-être qu’elle ne vous servira pas bien, mais elle ne pourra jamais vous être enlevée. C’est pour cette raison que c’est important de l’offrir aux personnes déplacées. De cette façon, si elles ont un jour l’occasion de rebâtir leur vie, elles auront une éducation pour les aider.
Pensons aussi au fait que, quand les gens sont déplacés, les filles risquent plus d’être forcées de se marier alors qu’elles sont encore des enfants. Quand elles vont à l’école, cela leur évite de se marier. Nous pourrions donc dire que l’éducation est une sorte de remède, qu’elle réduit le taux de mariages précoces. Ces avantages sont donc assez importants. Quand nous parlons d’éducation aux membres du G7, il est donc important d’aborder dans le même contexte l’élimination de la violence faite aux femmes et des mariages d’enfants. Parce que l’éducation peut nous permettre de résoudre tant de grands problèmes du 21e siècle qui sont à notre portée. C’est l’un des problèmes que nous sommes capables de résoudre. Merci.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Merci.
Melinda, votre fondation a été vraiment très active dans le domaine de l’éducation, et ce, dans le monde entier. Parlez-nous de ce que vous avez accompli et de ce qui est essentiel, à votre avis, pour les prochaines années.
MELINDA GATES : Oui. Alors, l’éducation... je pense... la statistique la plus importante en matière d’éducation, à mon avis... il y a tellement de raisons pour lesquelles l’éducation est importante et je pense que nous les connaissons, mais si une maman est instruite ou qu’une fille est instruite, son enfant a deux fois plus de chances d’atteindre son cinquième anniversaire. Deux fois plus de chances. Parce que l’éducation donne à cette femme une voix, un pouvoir décisionnel, la capacité d’accepter un emploi bien rémunéré si elle le souhaite ou si elle en a l’occasion. Quand Bill et moi pensons au reste du monde, nous nous disons qu’il faut d’abord commencer la vie en bonne santé. Sans la santé, il est impossible d’obtenir une éducation. On doit d’abord être en bonne santé. Quand un enfant est malade, c’est plus difficile de faire ce qu’il faut pour obtenir une bonne éducation. Mais si la mère est instruite, elle peut donner le nécessaire à son enfant pour que son enfant ait la chance de grandir en pleine santé et d’aller à l’école. J’ai rencontré bien des gens. J’ai discuté pendant des heures avec des hommes et des femmes partout dans le monde au sujet de leur santé, de leurs besoins fondamentaux et ainsi de suite. Et je suis simplement une Occidentale en kakis et en t-shirt. Dès que je leur demande quels sont leurs espoirs et leurs rêves d’avenir ou ce qu’ils espèrent pour l’avenir de leur famille, tout le monde me répond systématiquement que c’est l’éducation de leur enfant. L’éducation de leur enfant.
Et quand je pense à l’éducation de mes propres enfants et à ce que je leur dis depuis aussi loin que je me souvienne, à ce que mes parents m’ont dit au sujet de l’éducation, à ce que mon éducation m’a permis de faire, où elle m’a permis d’aller ou à toutes les femmes et tous les hommes sur ce panel... Je pense que l’éducation est simplement fondamentale. La dernière chose que je dirai est la suivante : aux États-Unis, un dicton dit qu’il est terrible de gaspiller l’intelligence. Et quand je pense à la moitié de toute l’intelligence qui existe – wow – je pense à tout ce qui pourrait s’accomplir dans le monde.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Merci. Nous allons maintenant répondre aux questions du public. Nous n’en prendrons pas trop, parce que nous pourrons discuter avec ces hommes et ces femmes extraordinaires du panel à la réception qui aura lieu bientôt. Je me suis donné comme règle de ne jamais participer à un panel qui ne serait pas paritaire, mais vous comprendrez que je suis vraiment ravi de prendre part à celui-ci, ce qui m’amène à la question que j’aimerais poser. Nous avons parlé, un peu plus tôt, de ce que j’aimerais voir ressortir de ce panel. Je pense que Roberta a mentionné qu’il faudrait faire avancer les bons enjeux. Tout le monde sait que le contexte politique est parfois complexe et que le G7 est une organisation fondée sur le consensus. Tout le monde n’a peut-être pas réalisé les mêmes progrès en matière d’égalité des sexes. Et la question que nous sommes venus à nous poser, vous savez, c’est à quel point le Conseil peut-il exercer de la pression? C’est alors que je me suis dit qu’il s’agissait là d’une occasion de créer un rapport et un ensemble de recommandations qui va bien au-delà du G7.
On parle ici de gens ayant un savoir et une expérience extraordinaires qui se réunissent pour discuter de ce que le monde doit vraiment faire à l’avenir, alors ne vous inquiétez pas à savoir si j’aurai du mal à susciter un consensus au G7. C’est notre défi, en tant que dirigeants du G7 : nous assurer de capter les idées audacieuses et concrètes qui nous permettront vraiment d’avancer. C’est exactement ce que nous avons appris au cours des deux derniers jours, et je sais que ces idées seront intégrées au rapport complet.
Mais cela amène aussi des questions qu’il vaut la peine de débattre. Nous l’avons fait lorsque nous avons présenté notre cabinet paritaire ou notre budget fondé sur une analyse comparative entre les sexes, parce que l’égalité est aussi un argument économique. Mais il y a eu beaucoup de réticence. Beaucoup de gens défendent le statu quo, beaucoup de gens n’ont pas encore compris les faits réels et la valeur économique de l’éducation, d’un développement adéquat. Cela nous pousse à nous demander de quelle façon nous pourrions contrer cette réticence et, également, comment amener plus d’hommes à être plus à l’aise d’être des alliés et des féministes et de faire partie de la solution. De quelle façon, selon vous, pourrions-nous faire avancer la conversation de manière assez inclusive pour que tout le monde y participe, mais en même temps de manière assez vigoureuse pour rattraper les décennies ou les siècles de temps perdu? Je pourrais commencer avec Chris, parce qu’elle vient d’une organisation assez hiérarchique et patriarcale...
Je parle du domaine du génie, évidemment. Mais aussi de l’armée.
LGEN CHRISTINE WHITECROSS : Merci, Monsieur le Premier Ministre.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Elle est au rang de général... elle peut en prendre...
LGEN CHRISTINE WHITECROSS : Je vais être entièrement sincère et transparente : j’ai appris, au cours des cinq à huit dernières années peut-être, que ce n’est pas tout le monde qui comprend. Ok, c’est un cliché de le dire, mais dans la mesure où les gens vont dire la bonne chose... Je crois qu’un membre du panel a dit plus tôt que certains diront ce qu’il faut dire, qu’ils hocheront de la tête au bon moment, mais qu’ils ne comprennent vraiment pas ou, bien franchement, qu’ils s’en fichent. Je pense que cela ne joue pas en notre faveur, parce que lorsque l’on pense aux politiques partiales ou à notre façon de traiter les gens ou de penser, nous pourrions retirer tant de bienfaits d’un tout petit changement d’attitude. Je vais le dire comme ça.
Et je pense au Collège de défense de l’OTAN, où je suis actuellement, et nous venons tout juste, pour la première fois, de nommer un conseiller en égalité entre les sexes – un homme américain. C’était mon choix. J’avais mes propres raisons pour ce choix, car la plupart des gens ne croyaient pas que c’était nécessaire, et parce que je crois qu’une occasion se présentait à nous d’examiner l’éducation sous un angle stratégique, et d’amorcer une discussion ou une conversation sur l’égalité entre les sexes. Mais comment faire cela sans tout d’abord établir un dialogue? Je crois que le dialogue est si important. Et nous venons de commencer, alors il y a beaucoup de travail à faire, mais seulement pour ce qui est de… alors que nous parlons aux gens, et que nous leur donnons des solutions pragmatiques à de vieux problèmes, je crois que les gens commencent à apprendre et à participer davantage, mais c’est très très difficile, et de nombreux antécédents entrent en jeu dans bien des cas, comme vous en avez déjà fait allusion à quelques reprises aujourd’hui, alors c’est ce que je peux offrir.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Roberta?
ROBERTA JAMIESON : Trois choses. Commencez avec les garçons. Nous devons changer la façon dont on demande aux garçons de se voir et le rôle qu’ils jouent dans la société.
Et de comprendre à quel point il est nuisible pour eux de ne pas voir plus de femmes jouer différents rôles dans leur vie. Numéro un.
Numéro deux, les gens qui y sont ouverts, et qui vous écouteront, parlez-leur, pas seulement au sujet de la justice, je crois que ces personnes entendent, qu’elles n’entendent pas seulement parler des droits, il faut leur communiquer des faits bien établis concernant les bienfaits pour l’économie. Je parle à bien des gens au sujet… le simple fait de combler l’écart avec les peuples autochtones, au chapitre de l’éducation et de l’emploi au Canada, injectera 335 milliards de dollars dans notre PIB d’ici 2031? Argument très convaincant. Les gens se préoccupent de leurs propres intérêts, alors je suis très pragmatique comme vous le savez, Monsieur le Premier Ministre. Je me concentrerais donc sur leurs intérêts.
Numéro trois, les gens qui ne comprennent pas, ne comprendront pas, ne perdez pas votre temps.
Confrontez-les, mais plus de gens que vous, Monsieur le Premier Ministre, et ceux proches de vous doivent les confronter. Ceux et celles ici et là, la personne moyenne doit les exposer et leur demander de rendre des comptes, et puis ensuite passer à autre chose.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Phumzile, vous travaillez aux Nations Unies, une organisation qui présente certainement des défis, mais qui est aussi bien renseignée. Comment évaluez-vous votre capacité de sensibiliser les gens?
PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA : Vous savez, je crois que, dans cette ère numérique, notre capacité de sensibiliser les gens, y compris ceux qui se trouvent à la fin du processus, s’est améliorée considérablement. Par exemple, notre capacité d’assurer une éducation universelle s’est améliorée radicalement, mais je ne crois pas que la capacité des dirigeants de saisir cette occasion s’est aussi améliorée radicalement. J’étais… je dis cela avec amour aux politiciens.
Je travaillais au gouvernement, dans mon pays, en Afrique du Sud, et je me souviens très clairement des journées où les fonctionnaires nous donnaient des exposés sur les TIC. Nous étions soient si impressionnés par le tape-à-lœil que nous acceptions parfois de dépenser de l’argent sur des choses que nous ne comprenions pas entièrement, soit si effrayés que nous y avons résisté; et il est essentiel pour les décideurs de comprendre comment la technologie du 21e siècle peut nous aider à régler les problèmes de développement… sinon les décideurs deviennent une partie du problème et ralentissent le développement de la société. Il y a un écart entre les personnes qui comprennent la technologie et la science et celles qui œuvrent dans les sciences sociales et les arts, et ces domaines ne se recoupent pas assez souvent pour que nous puissions mettre à profit les forces des deux parties, car vous voulez… c’est un ingénieur avec un chapeau, mais il y a beaucoup d’ingénieurs qui ne sont pas… dont l’intelligence émotionnelle n’est pas une force.
Même s’il y a beaucoup de personnes dans les arts qui n’aiment pas la technologie. En tant qu’enseignante, je sais. Comme enseignants… en tant qu’enseignante dans les sciences sociales, nous n’avons jamais pensé que la technologie nous concernait, donc réunir toutes ces choses, je crois, est un élément manquant important qui nous permettra de mettre à profit les forces de tous, mais en particulier pour ce qui est d’assurer l’accès des enfants, des jeunes et des femmes en régions éloignées à une éducation, de sorte qu’une éducation de qualité soit accessible dans toutes les régions du monde.
Pensez à la technologie de chaîne de blocs et au transfert d’argent dans les camps de réfugiés. Ça peut changer entièrement la vie d’une personne, mais je crains que ces sujets ne soient pas abordés dans les cabinets qui se penchent sur l’allégement de la pauvreté, donc cette façon d’apprendre très binaire, selon laquelle, si vous voulez entamer une carrière dans les TIC vous devez avoir de telles notes en 12e année dans un niveau particulier, puis être admis dans une faculté précise et ainsi de suite, car c’est le seul moyen d’accroître les compétences numériques. Je ne crois pas que c’est la bonne façon de faire.
Nous devons rendre l’enseignement multidisciplinaire. Vous pouvez fréquenter une école d’art et ensuite diriger une entreprise technologique, car les gens utilisent la technologie dans le domaine des arts. Pourquoi ne peuvent-ils pas diriger l’industrie de la technologie de sorte qu’il n’y a qu’une seule voie à suivre pour combler les pénuries? Donc, sortez des sentiers battus. Oubliez ces sentiers complètement. Ne changeons pas le paradigme, éliminons-le complètement, et repartons à zéro.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Leymah… Leymah, comment enseignons-nous à nos garçons à être féministes, comment enseignons-nous à nos dirigeants à être féministes, comment… comment mobilisons-nous les gens, ça… cette révélation à laquelle tant de gens résistent, ou qui leur fait peur parce qu’ils ne la comprennent pas?
LEYMAH GBOWEE : Et bien je suis une personne pragmatique, et je crois au pragmatisme, en des exemples concrets tirés de l’expérience sur le terrain. Il y a quelques années, j’ai vu mon père faire la promotion de l’éducation des filles dans son village. Je venais de remporter le prix Nobel de la paix et, comme le veut notre tradition, nous devions aller au village pour danser pendant 24 heures. Et…
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Cela ne fait pas partie de la tradition scandinave originale pour les lauréats des prix Nobel.
LEYMAH GBOWEE : Mais c’était beau. Nous sommes arrivés là, et les hommes se sont assis autour de lui. Bien sûr, il était l’homme le plus important ce jour-là même s’il n’avait pas le titre de chef. Pour bien des raisons, il avait refusé que nous subissions le processus de MGF, alors il est devenu la honte de la communauté, mais quand nous… quand j’ai remporté le prix Nobel et que nous y sommes retournés, ils sont tous venus l’honorer, et quelqu’un lui a demandé… et ensuite il a dit à un de mes oncles « tu vois ce que j’essayais de te dire… d’envoyer tes enfants à l’école, surtout tes filles. Maintenant, je voyage quand je veux. Je change de voitures de temps à autres. La facture de l’hôpital n’est pas un problème. Mes cinq filles ont pris soin de moi. Voilà pourquoi tu dois envoyer tes filles à l’école.
Ce qu’il a dit a marqué ces personnes, car elles pouvaient le voir… voir sa vie… c’était la première chose que j’ai constatée. La deuxième chose… je participais à une conférence au Royaume-Uni il y a de cela bien des années, et nous parlions de la violence sexuelle et fondée sur le sexe, et le rôle que l’armée doit jouer, notamment en ce qui concerne le maintien de la paix. L’un des généraux s’est levé et a dit, si quelqu’un dans cette salle croit que je suis allé à un collège militaire pour faire partie d’un groupe appelé la brigade Firewood ayant pour mandat de protéger les femmes contre le viol, cette personne se trompe. Je voulais lui lancer mes souliers.
Mais, il y avait ce général nigérian, Festus Okonkwo, assis à côté de moi, il a pris ma main et m’a dit « ne bouge pas ».
J’ai dit, général, et il m’a répondu, Leymah, je m’en occupe. C’était à son tour de donner un exposé. Le général Okonkwo s’est levé et a affiché une photo très explicite d’une personne morte, détruite. Le cas de cette femme avait suscité énormément d’attention pendant la période Taylor. Elle avait été violée, tuée, et ils ont inséré un objet, désolé de le dire, mais c’est la réalité, dans ses parties privées jusqu’à ce que l’objet ressorte de sa bouche. Après avoir affiché cette photo, il s’est tourné vers les autres généraux dans la salle. Il leur a demandé, combien d’entre vous, dans le cadre de vos fonctions, peuvent voir des choses comme ça et tout de même conclure qu’il n’est pas nécessaire de se joindre à la brigade Firewood? Aucun général dans la salle ne pouvait dire quoi que ce soit, car il avait parfaitement présenté son argument. Il a dit, nous échouons chaque fois que des choses comme ça se produisent pendant que nous sommes en service. Comment pouvez-vous regarder vos filles et vos femmes dans les yeux quand vous rentrez à la maison, sachant que, lorsque vous êtes en service, les femmes et les filles ne sont pas en sécurité?
Il est temps pour nous… quand une personne me dit qu’elle va donner un exposé aux Nations Unies et qu’elle a bien hâte, je lui dis de ne rien écrire. Ils le savent déjà. Ils ont des volumes et des volumes qui ne font qu’accumuler de la poussière et de la saleté. Emmenez-les sur le terrain pour qu’ils voient ce qui se passe réellement. Certaines de ces choses auront un effet transformateur. Nous ne pouvons pas toujours être diplomatiques en ce qui concerne les enjeux liés aux femmes, des problèmes mondiaux auxquels nous sommes confrontées. Il est temps de se débarrasser de la diplomatie, car je dis toujours aux gens qu’ils ont deux options, d’après moi : dites la vérité et ne recevez jamais une invitation, ou mentez et ne recevez pas d’invitation. Je choisis de dire la vérité… à vous de m’inviter à un autre moment donné.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Je ne sais pas comment quelqu’un peut suivre ça, mais Melinda, vous allez essayer.
Melinda, vous avez été active dans des sphères extrêmement influentes du secteur privé au cours des dernières années… vous et votre mari, quand vous avez décidé de vous attaquer à ces enjeux mondiaux et à cette cause en particulier. Vous avez certainement rencontré des gens qui avaient des mentalités très différentes et qui n’étaient pas nécessairement prêts à apprendre une façon entièrement nouvelle… une nouvelle façon de faire. Quelle est la meilleure façon de collaborer avec ces personnes?
MELINDA GATES : Oui, je crois que j’ai commencé à apprendre cette leçon. J’ai eu la chance de fréquenter une école secondaire pour filles, dirigée par des sœurs catholiques et nous avions des ordinateurs, et heureusement que mon père et ma mère voulaient que leurs quatre enfants reçoivent une éducation. Les deux filles et les deux garçons. Mon père me parlait tout le temps de ces mathématiciens exceptionnels qu’il convainquait de joindre son équipe. Il a participé au lancement de la première mission Apollo aux États-Unis, et il a dit que son équipe s’en tirait toujours mieux quand une mathématicienne en faisait partie; j’ai donc appris à un très jeune âge que les femmes peuvent être bonnes en mathématiques et en sciences, et je savais que je pouvais être bonne en mathématiques et en sciences grâce à mon père. Mais j’ai commencé à me heurter à ce stéréotype en sciences informatiques, comme vous pouvez l’imaginez au collège, après avoir quitté une école pour filles, alors je m’y suis heurtée partout dans le monde, mais j’ai constaté que tous les hommes qui soutiennent les femmes, et je travaille avec eux, tout homme que je rencontre, et toute femme, mais c’est souvent les hommes, soyons honnêtes, qui ont le contrôle, qui sont aux rênes, et donc j’essaie d’encourager d’autres femmes chaque fois que j’en ai la chance, être une mentore, une parraine, pour aider les femmes, et je confronte le hommes qui érigent des obstacles dans le chemin des femmes. Même à l’intérieur de notre propre organisation, même si je le fais, il m’arrive parfois, par inadvertance, d’être biaisée. Mon mari aussi quand nous dirigeons. Je le lui mentionne, et je fais la même chose pour moi.
Alors… je trouve que les hommes qui veulent défendre les intérêts des femmes, les généraux, les personnes dans l’armée, les legutiers, les personnes qui sont prêtes à briser le silence, et je m’assure qu’ils partagent ce pouvoir au nom des femmes. Aussi, j’aimerais réitérer quelque chose qui a déjà été dit, par Roberta, au sujet des garçons. Nous devons éduquer nos garçons. Nous devons arrêter de dire à nos garçons d’agir comme des hommes. C’est la pire chose que vous pouvez dire à un garçon.
Alors j’ai trois enfants, une fille, un garçon et une fille. Une au collège et deux au secondaire. Mon garçon est sur le point d’obtenir son diplôme collégial, et… son diplôme… d’études secondaires et j’étais si fière de lui, à son 18e anniversaire, nous avons eu de nombreuses discussions autour de la table à dîner, en famille, au sujet du féminisme, des droits des LGBTQ, de tout ce qui se passe dans le monde; nos enfants ont visité avec nous des endroits durement touchés par la pauvreté, et j’ai demandé à mon garçon s’il me permettrait de rédiger un article sur le fait qu’il est féministe. Je savais qu’il l’était. Et il… nous protégeons sa… la vie privée de nos enfants, jusqu’à un certain âge, de très près, et il a dit, absolument, maman, je n’ai aucun problème avec ça. Et ç’a ma fait pensé… j’ai dû faire quelque chose de bien dans mon rôle de mère. Et je vous dis ça fonctionne avec les hommes qui soutiennent les femmes, et ça enseigne à nos garçons l’importance d’être féministes.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Merci. J’ai promis de répondre à différentes questions de l’audience, alors prenons trois questions de suite, une de chaque section, puis les membres du panel pourront y répondre avant que l’on récapitule le tout. La conclusion ne sera pas très longue, car les travaux sont en cours, et ils se poursuivront après ce panel.
Quelqu’un a une question? Ok, je vois une main ici, juste ici. Dalal, donnez-lui le micro, oui.
QUESTION : Bon après-midi aux membres distinguées du panel et au Premier ministre. Mon nom est Emily Mills, et je représente le réseau How She Hustles; l’un des sujets de l’heure pour bon nombre des femmes dans mon réseau est la façon de s’y prendre pour participer aux discussions qui sont tenues à l’heure actuelle; de nombreuses femmes, aujourd’hui justement, discutent en ligne, sur Facebook, des limites associées aux importantes discussions qui ont lieu au sujet de l’avenir de notre monde et de notre pays. Elles n’y ont pas accès, car parfois ces discussions sont tenues dans des endroits et des espaces où elles ne sont pas invitées.
Alors, ma question est la suivante : comment les femmes qui n’ont pas le privilège ou l’accès nécessaire, ou qui ne sont pas sur la bonne liste, peuvent-elles participer à la discussion?
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Excellente question, merci beaucoup. Prenons une autre question; ici, au centre. Oui. Levez-vous s’il-vous-plaît.
QUESTION : Bonjour, merci d’avoir organisé ceci et de nous avoir invités. Mon nom est Huda et je suis la fondatrice d’une entreprise en démarrage à Toronto. Le nom de mon entreprise est Dot Health. J’ai constaté dans certaines organisations communautaires et dans le travail qu’elles font que des gens ont une réaction négative à des choses comme les quotas ou la promotion sociale; je voulais savoir, du point de vue du G7 et de chacune des organisations dont vous faites tous partie, comment nous pouvons demander aux organisations, aux personnes, aux gouvernements et aux responsables des politiques de rendre des comptes sur les résultats et non seulement sur ce que nous disons? Merci.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Merci.
Une autre question dans cette section. Oui.
QUESTION : Bonjour, mon nom est Helen Kennedy et je suis membre de l’organisation « Egale », qui se consacre aux droits des communautés LGBTIQ2S au Canada. J’ai bien aimé l’analogie que vous avez faites pour ce qui est de sortir des sentiers battus, et je voulais savoir, sortez-vous des sentiers battus lorsque vous vous penchez sur les questions liées au genre, à l’approche non binaire et à l’intersectionnalité en ce qui concerne les communautés LBT et 2S? Merci.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Merci. Bon, nous avons reçu une question concernant les organisations communautaires et la façon de faire participer un plus grand nombre de femmes à la discussion, de femmes non habilitées à la discussion; une autre question sur les quotas et la promotion sociale, ainsi qu’une excellente question de Helen sur les identités non binaires et l’intersectionnalité. Qui aimerait répondre en premier? Chris, à vous la parole.
LGÉN CHRISTINE WHITECROSS : Puis-je… j’aimerais parler des cibles et de la promotion sociale… alors, dans les Forces armées canadiennes, nous avons une cible de 25 % pour ce qui est de la proportion des femmes dans les Forces armées canadiennes, et nous n’avons jamais atteint cette cible. Nous en sommes à 17 % actuellement, et nous avons fixé cette cible il y a environ 20 ans de cela. Et cette cible est justifiée; bien des gens diraient, évidemment les femmes ne veulent pas s’enrôler, alors pourquoi établir des cibles? Et ce n’est pas la réponse, la réponse est que nous… il y a plusieurs réponses. Ce que j’essaie de dire… si, comme moi, vous prenez les cibles au sérieux, il faut prendre des mesures draconiennes pour les atteindre. Et parfois cela signifie que vous devez prendre des décisions qui ne sont pas populaires, mais plutôt axées sur les résultats, et des fois vous devez allez au plus profond de vous‑même pour trouver le courage de faire la bonne chose. Alors, le CEMD et moi travaillons très fort pour enregistrer une augmentation de un pour cent par année au cours des dix prochaines années; pour y arriver, il faudra changer entièrement nos méthodes de recrutement, de maintien en poste, de… mobiliser différents groupes culturels, les groupes non binaires, mobiliser tous les gens en utilisant la plateforme où ils se sentent à l’aise, et faire en sorte que leur carrière dans les Forces armées canadiennes soit aussi productive et stimulante, et aussi plaisante et exigeantes qu’ils le souhaitent, et non créer un environnement où les carrés vont avec les carrés et les cercles avec les cercles, car cette solution ne fonctionne pas de nos jours. Et de bien des façons cela… tout est une question de leadership, et par leadership je ne parle pas d’être premier ministre ou dirigeant du CEMD, le leadership signifie que dans chaque facette de l’humanité les gens peuvent apporter des changements, et il faut vraiment créer ces possibilités et en tirer le plus grand parti possible, et faire ce que vous savez aura un effet positif. Et parfois, ce travail s’accompagne d’une grande angoisse et exige un important examen de conscience, mais vous savez, ultimement c’est la chose à faire, et je crois que, tout compte fait, les gens le reconnaîtront.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Merci.
LEYMAH GBOWEE : Je ne sais pas si je peux répondre à la question de ma sœur pour ce qui est d’accroître le nombre de femmes participant à la discussion, mais une chose que je sais est que, en cette ère technologique, les femmes créent des places et des espaces pour elles-mêmes ailleurs qu’autour de la table. Je sais que celles qui ont commencé des mouvements « mot-clic », même si je n’aime pas glorifier certains de ces mouvements, car je suis l’une de ces Africaines qui croient que, avant les mouvements « TimesUp » et « MoiAussi », les femmes dans les organisations communautaires traitaient déjà de ces enjeux, et ce n’est pas quand ils sont devant la caméra que les gens devraient être les plus motivés.
Vous savez, mais je crois que nous pouvons… même si nos communautés commençaient à préparer des programmes que les gens, que nous pourrions promouvoir, et que les gens peuvent suivre… certains de ces espaces et certaines de ces places sont… la ministre Monsef a dit, et je prononce toujours mal son nom, que nous frappons à des portes ouvertes. Mais je crois que dans la plupart des cas, ce n’est pas la réalité. Vous savez, la porte pourrait sembler ouverte, mais cela ne garantit pas l’obtention de résultats, alors je crois que nous devons continuer de lutter et d’avoir confiance en la capacité de celles assises autour de la table de représenter les intérêts de celles qui ne sont pas présentes. Parce que, la plupart du temps, on présume que les personnes invitées à la table ne représentant pas nos intérêts. L’ambassadrice Hudon et Melinda peuvent confirmer que nous leur avons rendu la vie très difficile ce matin. Car nous savions, et j’aime comment Katia (ph) l’explique : nous avons accepté de faire partie de ce groupe de travail pour représenter avec intégrité toutes les voix de nos communautés, et nous n’allons omettre aucun point qui nous permettra justement de représenter les voix des personnes qui nous ont fait confiance.
Je crois donc que c’est une question de compréhension, de confiance… tout comme nous parlons de faire confiance aux femmes siégeant à la table, nous demandons aussi cette confiance lorsqu’il est question de financement. Les problèmes d’argent pour les femmes… car maintenant, en tant qu’activiste communautaire, je considère le financement et la confiance comme une demande de visa dans un consulat canadien. Nous ne pouvons pas vous donner de visa, car vous n’avez jamais voyagé auparavant. Mais comment est-ce que je peux voyager si vous ne me donner pas un visa? Vous savez?
Nous ne pouvons donner des fonds à cette organisation féminine, car elle n’a jamais fait ce travail auparavant, et je sais que je dois conclure, revenir au mouvement #MoiAussi et à toutes ces autres choses, je sais qu’on en a dit beaucoup sur le sujet, y compris vous, Monsieur le Premier Ministre, dans votre déclaration, mais quand j’examine le succès de ces campagnes, je constate que les gens veulent venir en personne et parler de leurs expériences. Quand je me suis assise à une table avec une dame qui m’a dit qu’après les mouvements #MoiAussi et #TimesUp – elle gère un centre qui offre des services aux femmes victimes de violence ici, au Canada – le nombre de personnes qu’accueille son centre a augmenté de 100 %, mais son financement, de 0 %.
Alors pensons à toutes ces choses, à la confiance, à la confiance en l’une et l’autre autour de cette table, mais aussi, alors que nous demandons cela, nous demandons aussi aux donateurs et aux bailleurs de fonds de nous faire confiance, et nous devons aussi comprendre que, lorsque des mouvements de ce genre voient le jour, qu’ils vont être accompagnés de réussites, mais aussi de défis que nous allons devoir relever.
PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA : En ce qui concerne les efforts visant à rejoindre les femmes et à assurer leur présence à la table, il faut préciser que ce ne sont pas toutes les tables auxquelles il est valable pour les femmes de s’asseoir. Alors les femmes doivent créer leurs propres tables; elles seraient surprises de l’influence que nous pouvons exercer.
Nous avons choisi de siéger à la table du G7, car nous croyons qu’elle en vaut la peine. Il y a toutefois beaucoup d’autres tables auxquelles nous refusons de participer parce que nous ne croyons pas qu’elles représenteraient une utilisation judicieuse de notre temps; il faut tenir compte de cela. Toutefois, en cette ère où il est possible d’exercer une influence informelle, mais de grande portée grâce à la technologie, cette dernière est aussi devenue une table. Si j’avais écouté toutes les personnes d’influence qui ont parlé du mouvement #MoiAussi – il s’agit d’une table qui s’est créée toute seule, sans invitation. Alors, il faut aussi trouver différents moyens de nous approprier le pouvoir, et de l’utiliser de façon efficace. Cela dit, je crois que votre point tient toujours, et c’est pourquoi l’apport d’un soutien aux mouvements communautaires qui peuvent rejoindre toutes les femmes… car la proximité demeure importante, et c’est pourquoi il est toujours important de financer des organismes communautaires féminins, comme ceux dont parlais Leymah, et comme l’a annoncé le Premier ministre, parce que ces organismes permettent de faire participer un plus grand nombre de femmes.
Je tiens aussi à aborder la question de l’approche binaire et non binaire vis-à-vis du travail que nous effectuons, et je commencerais en disant que la santé et les droits sexuels et reproductifs sont fondamentaux.
Si les femmes ne sont pas en mesure de prendre une décision concernant… les hommes et les femmes concernant leur sexualité, si elles ne peuvent pas prendre de décisions concernant leurs activités de reproduction, si elles n’ont pas de mot à dire quant au moment où elles vont avoir des enfants, c’est une tragédie. Si vous pouvez vous imaginer quelqu’un dans cette salle, si nous n’avions pas la capacité de décider quand nous allons avoir des enfants, combien nous allons en avoir, c’est inimaginable d’être dans cette situation. Des millions et des millions de femmes dans le monde sont dans cette situation. Parfois, je pense que le moment le plus important dans la libération des femmes au cours du siècle dernier est l’invention de la pilule anticonceptionnelle. Il n’y a rien de plus favorable pour l’autonomie que ça. Et encore aujourd’hui… nous sommes actuellement à la recherche de la prochaine grande invention. Mais, en même temps, ce ne sont pas toutes les femmes qui ont pu profiter du mouvement de libération que cette invention scientifique a permis de créer, car les hommes ne leur ont pas permis.
C’est la bonne chose dont toutes les femmes ont besoin, c’est quelque chose que les gouvernements et les hommes ne contrôlent pas, alors… oh et les partenaires, plutôt, ne contrôlent pas, alors les femmes peuvent décider quand et comment obtenir la pilule, et l’invention de la pilule, dans une certaine mesure, a permis cela, car même si le partenaire ne veut pas que vous la preniez vous pouvez tout de même la prendre, si vous pouvez vous permettre de l’acheter, vous n’avez pas besoin d’obtenir une permission. Alors, nous avons besoin de ces mécanismes pour donner aux femmes le plein contrôle.
Et, Monsieur le Premier Ministre, parfois je me sens épuisée et frustrée quand, aux Nations Unies, nous devons convaincre les États membres que les femmes doivent être en contrôle de leur corps. Les hommes qui occupent les plus hauts rangs dans la plus importante enceinte, laquelle est censée s’occuper de nous tous, font bloc pour empêcher aux femmes d’être en contrôle de leur corps. C’est quelques chose de très inquiétant. Lorsque des femmes prennent des décisions concernant leur sexualité, les mêmes défis se présentent parfois. Et c’est pourquoi le langage de la loi est encore vague. Pour les femmes, il est encore difficile de promouvoir un langage qui veillera à ce que nous n’adoptions pas seulement une approche binaire, et que nous soyons en mesure d’être ouvertes et de créer des espaces et le vocabulaire qui permettront aux États membres d’accepter les choix non binaires qui existent, et auxquels on a tous droit. Je ne veux pas mentir. Nous l’avons, nous l’utilisons, mais nous ne le voyons pas encore dans les documents officieux et officiels des instituts. C’est donc une bataille que nous devons livrer ensemble. Plus nous en parlons, plus de pays comme le Canada où le premier ministre utilise ce langage, où les ministres l’utilisent… nous disons « wow »… ce n’est pas comme ça partout dans le monde. Et nous devons nous aider les uns les autres pour en faire un langage acceptable. Pour cela, nous devrons sortir entièrement des sentiers battus. Nous ne sommes pas encore tout à fait là.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Roberta?
ROBERTA JAMIESON : Je ne répéterai pas ce qui a déjà été dit, sauf pour dire que je suis entièrement d’accord avec les derniers commentaires qui ont été faits. Je parlerai seulement de la question des quotas. Je suis en faveur des quotas.
Ça m’est égal ce que vous les appelez, mais j’en ai assez d’espérer, d’attendre, de me porter volontaire… d’expliquer… ça ne fonctionne pas. Vous savez? Si vous… je vais donner un exemple commun : les conseils d’administration, parlons d’un organe incontournable dans le secteur privé… les conseils d’administration. Au cours des deux dernières années, les changements au sein des conseils d’administration en ce qui concerne la représentation des femmes… minuscules. Je crois que nous avons observé une croissance d’un peu plus de 1 % l’année dernière. Et là, je ne parle même pas de la représentation d’autres groupes. Je parlerai seulement des Autochtones; et bien, nous faisons marche arrière! Nous sommes à moins de 1 %. Nous avons atteint 1,3 %, je crois, et nous sommes maintenant de retour à 0,8 %. Donc, soit on ne bouge pas, soit on régresse. J’appuie la proposition voulant que le G7 établisse une démarche pour assurer la transparence des pays, et les tenir responsables de ces innombrables déclarations et communiqués qu’ils ont diffusés au fil des ans. Nous nous sentons tous bien quand nous les lisons, puis attendons la prochaine réunion. On les réinvente, et le cycle reprend. J’appuie donc les quotas, les rapports, les publications, tout ce qui oblige de rendre des comptes. Toutes ces choses auraient dû être élaborées il y a longtemps. Voilà ce que je pense, Monsieur le Premier Ministre.
MELINDA GATES : Je ne tenterai pas de répondre à toutes les questions, car je crois que le panel s’en est déjà bien tiré de ce côté. Permettez-moi tout simplement de dire, en guise de conclusion, que je crois que nous voulons tous apporter des changements concrets par l’intermédiaire du G7, vous aider à apporter des changements concrets pour les femmes et par cela je veux dire toutes les personnes; notre conseil a tenu une discussion sur l’intersectionnalité et l’approche binaire, et je sais que le W7 en a fait de même; je crois que nous avons besoin de recueillir plus de données sur ces questions, car pour réaliser un objectif il faut tout d’abord le mesurer, et lorsque les données sont obtenues de façon transparente, comme c’est le cas au Royaume-Uni, qui dispose d’une politique selon laquelle vous devez… déclarer la rémunération des hommes comparativement à celle des femmes, ce qui garantit la transparence; il y aussi beaucoup de moments « oh! oh! »; nous savons que tout effort déployé pour faire progresser la société doit commencer par une volonté politique, et que la transparence est essentielle; c’est alors qu’on peut changer les choses. Je crois donc que les données, les données importent, et j’ajouterai qu’il faut investir dans les femmes. Nous devons affecter des ressources à l’appui des femmes, car les femmes, elles, investissent dans le monde entier.
LE TRÈS HONORABLE JUSTIN TRUDEAU : Et bien, je tiens encore une fois à remercier les chefs de file extraordinaires sur la scène pour nous avoir donné de leur temps et de leur énergie. Je remercie également tous les membres du Conseil consultatif sur l’égalité des sexes du G7. Je sais qu’il en reste encore beaucoup à dire, mais je suis aussi très enthousiaste à l’idée de poursuivre ces discussions dans un cadre plus informel.
Merci encore une fois à toutes les personnes présentes ici aujourd’hui. J’aurais préféré qu’il y ait plus d’hommes dans la salle, mais c’est là un défi constant à relever; j’espère toutefois que, grâce à la magie des médias, ce message sera diffusé à grande échelle.
Merci à tous et à toutes. Applaudissons encore une fois ces femmes extraordinaires.
Merci beaucoup.